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Article 1 :

Mesurer et prévoir ses besoins

La priorité est d’identifi er l’origine des difficultés, sans complaisance. Et d’y voir clair sur les mois à venir.

Combien faut-il de trésorerie ? « De quoi payer ses factures », répond le bon sens, suivi d’un prudent : « avec une petite marge pour les imprévus ! » C’est-à-dire être libre d’acheter ce qu’on veut, quand on veut !

Un sentiment de toute-puissance qui disparaît aussi vite que fond la trésorerie, ce qu’expérimentent beaucoup d’agriculteurs en 2011. Quelles en sont les raisons ?

 

Le coup de bambou

Achats d’aliments. « Cette année, j’ai 25.000 € de dépenses supplémentaires à cause de la sécheresse, en comptant l’achat de paille à 130 €/t, des aliments en plus et l’implantation de dérobées », calcule Jean-Paul Thénot, éleveur d’une centaine de vaches allaitantes sur 180 ha de prairies. Une situation que beaucoup d’éleveurs vivent, choisissant de nourrir leurs troupeaux avec des fourrages achetés.

L’addition est rudement salée, mais la préservation du troupeau, l’attente de meilleurs prix de vente ou la validation des six mois de détention nécessaires pour la prime à la vache allaitante sont autant de raisons de persévérer. Et l’automne sera peut-être clément pour laisser pâturer les animaux...

Annuités. Le montant des annuités est un autre sujet délicat. Des investissements calibrés pour des résultats qui finalement ne sont pas atteints ont tôt fait d’étrangler une entreprise. Quelle attitude adopter ?

Une réflexion sur les raisons et la nature des investissements ne doit pas être évitée. Puis, en « pompier », trouver une solution avec les banques et les mesures publiques.

Dettes fournisseurs. Les ardoises s’allongent, toutes productions
confondues, signalent plusieurs coopératives. Inquiètes de la conjoncture, elles voudraient arrêter de « faire la banque » et réclament leur dû. Certaines en proposant un plan d’étalement des dettes.

Il est aussi envisageable de refinancer la dette par un prêt bancaire, dont le taux sera toujours meilleur que les 1,2 % par mois de l’ouverture de crédit appros (soit du 12 à 14 % par an).

Réserves à sec. « On arrive au bout des réserves, alerte Pierre Brosseau, responsable de la commission porcine à la Confédération paysanne. Depuis quatre ans, il manque en moyenne 10 à 12 centimes/kg de porc vendu. Pour un élevage de 100 truies qui produit 2.000 porcs par an, c’est un trou de plus de 16.000 € chaque année ! »

Alors pourquoi continuer ? « Parce que les élevages sont endettés à plus de 80 %, reprend Pierre Brosseau, et qu’il faut rembourser les dettes. » Une sorte de course en avant, en attendant un renversement de situation.

 

Une longueur d'avance

Sans se laisser décourager par l’état des lieux de la situation, voici des outils simples pour y voir plus clair dans ses besoins de trésorerie.

L’EBE prévisionnel. Calculer quel sera l’excédent brut d’exploitation (EBE), autrement dit la richesse créée lors du prochain exercice, est une première étape incontournable. Il s’agit de vérifier si le résultat à venir sera suffi sant pour payer les annuités et couvrir les prélèvements privés... Ne serait-ce pas imprudent de lancer la campagne sans vérifier que « ça passe » ?

 

 

Budget de trésorerie. Pour affiner la situation de trésorerie, rien de mieux que le budget de trésorerie. Sur une grande feuille de papier (format A3) ou un fichier informatique Excel, notez les dépenses et les recettes attendues dans les prochains mois (voir le tableau ci-dessus). Et faites les soldes mensuels et cumulés. C’est un outil très simple mais encore peu usité, regrettent plusieurs conseillers de gestion.

Si, « avant », les années passaient et se ressemblaient, ce n’est plus le cas depuis cinq ans ! Intrants comme prix de vente jouent le Yo-Yo. Ce budget devient un tableau de bord de gestion indispensable. Si la trésorerie est défi citaire deux mois d’affilée, peut-on décaler des paiements ? Emprunter à court terme ?

Prévoir ses prélèvements privés évite les surprises au moment de la remise des résultats comptables : le carburant pour la voiture, les cotisations de MSA, les impôts, etc. sont autant de dépenses souvent payées par le compte professionnel, mais affectables au privé !

Difficultés d’anticipation. Méfiance, il y a un décalage d’un an entre le résultat et la trésorerie réelle, comme l’illustre la mauvaise année 2009, qui s’est sentie en trésorerie six mois plus tard, au printemps de 2010, constate Sébastien Daguenet, de CER France Somme : « Or la difficulté de trésorerie est prévisible. C’est pourquoi il faut travailler sur trois budgets : le précédent, celui de l’année en cours et celui de la campagne de 2012, avec les objectifs que l’on se fixe. »

Les besoins de l’année. Pour évaluer les besoins en fonds de roulement, Sébastien Daguenet se réfère à un montant égal au moins à la moitié des charges réelles (charges de production et charges de structure comprenant assurances, salaires, MSA). Etre au clair sur les besoins et les échéances est essentiel.

 

 

Les indicateurs qui montrent d'où vient la fuite

La tension financière rencontrée est-elle ponctuelle, due à un événement accidentel ? Au contraire, témoigne-t-elle d’un problème récurrent, signe d’un manque de rentabilité ?

Pour répondre à ces questions, remontez à 2006 et calculez les indicateurs suivants :

l’évolution du chiffre d’affaires : il renseigne sur la valorisation des produits ;

l’évolution de l’EBE (produits-charges) : il permet de voir si les marges baissent. Auquel cas il faut se pencher sur les performances technicoéconomiques de l’entreprise ;

le ratio annuités/EBE : il montre l’importance des remboursements et donc si l’exploitation est « étranglée ». Le ratio doit être inférieur à 50 %, c’est-à-dire que moins de la moitié de la richesse créée (l’EBE) part à la banque. Le reste de l’EBE sert à autofinancer du petit matériel et aux prélèvements privés ;

• Le taux d’endettement et sa nature : l’endettement est-il modéré ? Dans quoi l’entreprise a-t-elle investi : dans la mise aux normes, dans des moyens de production, dans du matériel nécessaire ou de confort ?

• Les frais financiers à court terme (agios, intérêts des ouvertures de crédit et des prêts à court terme). S’ils sont trop importants, la trésorerie doit être consolidée avec des prêts à moyen terme.

 

 

Expert : JEAN-MICHEL MÉTAYER, conseiller à CER France Poitou-Charentes

« Une juste vision de sa situation »

« N’en restez pas aux sentiments de malaise, aux impressions, au message du “tout va mal”. Le plus important est de se situer, d’avoir une vision réaliste et factuelle de son entreprise pour mieux rebondir, au-delà du ressenti.

Etudier plusieurs indicateurs économiques et financiers sur les cinq derniers exercices, et se projeter dans leur évolution permet d’avoir une vision plus juste de sa situation.

Ensuite, posez-vous la question : “Quel est mon objectif, mon moteur ?” Le projet humain est aussi déterminant que le projet économique.

On ne peut pas s’arrêter à des indicateurs de performances. La preuve est qu’on ne parvient pas à calquer les résultats des meilleurs partout.

Une approche personnalisée est indispensable. L’agriculteur doit avoir un esprit d’entreprise. Il y a tout à imaginer à propos de l’image de l’élevage, la demande environnementale, le positionnement géographique, les circuits courts (pas seulement la vente directe). Soyons imaginatifs ! »

 

par Sophie Bergot

(publié le 19 août 2011)

 



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