La flambée des matières premières agricoles et les émeutes de la faim ont fait des biocarburants «un coupable idéal», mais la production européenne est différente des projets américains et brésiliens, s'est défendue, le jeudi 15 mai 2008 à Bruxelles, Prolea, la filière française des huiles et protéines végétales.
«Il faut regarder les spécificités qui entourent les projets», a soutenu Philippe Tillous-Borde, directeur général de Prolea, au cours d'une rencontre jeudi avec la presse.
Dans une tribune libre, Philippe Tillous-Borde regrette que les biocarburants soient devenus un «coupable idéal» depuis les émeutes de la faim, dans une tribune publiée sur le site internet de la filière.
«A l’heure où des crises alimentaires liées à l’augmentation du prix des matières premières sont observées à travers la planète, il est regrettable d’accuser l’agriculture qui a diversifié ses débouchés, et d’afficher les biocarburants, comme bouc émissaire du manque de matières premières agricoles, estime Philippe Tillous-Borde dans cette tribune. On ne répétera jamais assez que les facteurs ayant conduit à cette situation sont multiples et de nature très diverse: le réchauffement climatique, la baisse des stocks alimentaires, de mauvaises récoltes mondiales ces dernières années, l’évolution du changement de vie en Asie qui conduit la Chine à importer des céréales plutôt qu’à en exporter, et la spéculation financière sur le marché des matières premières agricoles renforcée depuis la crise des subprimes».
«Dans ce contexte, les biocarburants montés en épingle n’ont qu’un rôle très limité, tout particulièrement en Europe, là où le développement est maîtrisé et bien encadré», poursuit le responsable de Prolea.
«Avec les biocarburants de première génération, la production de chaque litre de biodiesel apporte conjointement 1,5 kg d’aliments pour la production de viande et de lait. Ce sont près de 3,5 millions de tonnes d’aliments qui seront ainsi fournis grâce à ce débouché, et c’est autant de tourteaux de soja qui ne seront plus importés mais resteront disponibles sur le marché mondial, écrit Philippe Tillous-Borde. Par ailleurs, les procédés de biocarburants de deuxième génération, lorsqu’ils seront mis au point d’ici à 2015, permettront à partir de matières cellulosiques de produire du gazole de synthèse tout en maintenant l’ensemble des terres agricoles en production. Au-delà de ce qui permettra de produire davantage, n’oublions pas de produire encore mieux. Aux querelles d’experts sur les bilans des biocarburants, je réponds par le progrès technique.»
«Concrètement, le bilan énergétique de la filière du Diester a progressé de 25% entre 2002 et 2007. Aujourd’hui, avec un litre de pétrole, nous produisons 3,5 litres de biodiesel et nous réduisons de 50 à 75% les émissions de gaz à effet de serre selon les méthodes de calculs. D’ici à 2010, nous comptons encore progresser.»