Lors des Journées techniques de la meunerie et des industries céréalières, plusieurs experts, scientifiques, acheteurs et sélectionneurs se sont retrouvés pour échanger sur la « qualité des blés de demain ». Certaines pistes d'amélioration au niveau agronomique sont expérimentées pour limiter l'érosion de la teneur en protéines. Une amélioration de la qualité des protéines au détriment de la quantité est par ailleurs envisagée, mais la difficulté est de concilier cette nouvelle alternative avec les attentes des marchés.
Leviers d'action pour les agriculteurs
« A l'échelle de la parcelle, plusieurs facteurs sont mobilisables par les agriculteurs », explique Philippe Gate, directeur scientifique chez Arvalis. Plusieurs travaux scientifiques ont été menés par Arvalis, dont certains résultats sont présentés. L'association du blé avec des protéagineux ou des légumineuses permet d'augmenter la teneur en protéines de 1,5 point mais engendre une diminution de rendement de 20 quintaux ou plus. Mais, le fractionnement avec des apports spécifiques de 20 unités d'azote postérieurs à la montaison permet de gagner un point en protéines.
Des systèmes innovants comme la culture sous couvert sont aussi un moyen efficace. Dans un essai mené en Champagne berrichonne, le blé sous couvert permanent de luzerne permet de conserver un rendement fixe autour de 58 quintaux, en économisant 50 unités d'azote et en gagnant 1,5 point de protéines.
« L'enjeu est de mettre en place des outils de pilotage adaptés pour permettre à l'agriculteur de contrôler ces nouveaux systèmes et d'en évaluer les conséquences », a conclu Philippe Gate. « Il est aussi nécessaire d'évaluer les performances de ces systèmes innovants », complète Christian Huygue, directeur scientifique adjoint pour l'agriculture. Il y a en effet souvent un décalage entre le conseil et la pratique réelle.
Compenser la baisse de la teneur en protéines par la qualité
Une des alternatives évoquée par la profession est d'orienter la recherche vers une amélioration de la qualité des protéines pour compenser la baisse quantitative, comme cela est le cas en Allemagne. « Mais il n'existe pas de systèmes performants pour mesurer cette qualité, comme il en existe pour mesurer la teneur en protéines », souligne Francois Gatel, directeur de France Export Céréales.
Ce qui pose le problème de visibilité dans les contrats à la vente. D'autant plus que les marchés ne sont pas prêts à accepter ce changement. « Nous cherchons un rapport prix/teneur en protéines. Notre filière est très exigeante sur la teneur en protéines », signale Kacem Raji, PDG et administrateur d'une société d'importation de céréales. « Si les blés français ou allemands n'ont pas la teneur en protéines requise, on ira s'approvisionner ailleurs. L'Ukraine et la Russie ont du blé très bon à des prix concurrentiels. »
Ainsi, « il n'est pas question de relâcher la recherche génétique et agronomique sur la teneur en protéines sur le plan génétique », a conclu Gilles Charmet, directeur de recherche à l'Inra.