La section nationale de la pomme a accueilli près de 80 personnes (producteurs, journalistes, responsables du SRPV...) dans le verger de Charles Benedetti, arboriculteur au Temple-sur-Lot (Lot-et-Garonne). L'objectif était de faire connaître les résultats d'une année de conduite de verger, selon la nouvelle réglementation phyto (arrêté du 12/09/06). L'arboriculteur s'était porté candidat, à la demande de Jacques Sanz, producteur et initiateur du projet, pour mener l'expérimentation sur 15 ha de gala et golden, la moitié de son verger de pommes.
«Lorsque j'ai accepté, je n'avais aucun a priori et j'ai suivi la réglementation à la lettre, avec l'aide des techniciens du Cefel (Centre d'expérimentation fruits et légumes)», confie Charles Benedetti.
Débutée le 17 mars, l'expérimentation a vite tourné au cauchemar. Le 22 mai, lors du premier comptage, réalisé par la commission mise en place pour mener l'essai et un expert judiciaire chargé de vérifier si le cahier des charges était bien appliqué, le taux de tavelure était déjà de 95 à 100% sur les feuilles et de 60 à 90% sur les fruits.
Le 24 juillet, la récolte était définitivement perdue, malgré 34 traitements contre la tavelure. Non loin de là, 15 autres hectares de verger, conduits en respectant la charte PFI (production fruitière intégrée), n'ont nécessité que 20 traitements et ont été récoltés dans un état sanitaire parfait. Pourtant, les conditions climatiques et les variétés étaient identiques.
«Je pensais que cette expérience allait être un "super-PFI", poursuit Charles Benedetti. Mais les contraintes imposées par la directive, comme l'interdiction d'entrer sur une parcelle après traitement pendant 48 h ou de traiter si le vent souffle à plus de 19 km/h, rendent le travail impossible et compliquent beaucoup la gestion du personnel. S'il pleut après un traitement, on ne peut pas retraiter derrière. Or, la tavelure n'attend pas 48 h pour s'installer. En outre, on doit s'équiper d'une station météo liée au téléphone portable (12.000 €) qui nous bipe dès que le vent atteint la vitesse fatidique.»
L'arboriculteur a ainsi dépensé davantage d'intrants pour une récolte invendable en fruits de bouche ou même pour la compote.
L'expert judiciaire a effectué 46 visites de contrôle. «Lors de la dernière, le 21 août, nous avions convié un huissier afin qu'il constate l'état de la récolte, précise Jacques Sanz. Aujourd'hui, nous demandons un moratoire et la remise à plat du projet, avant mars 2009. Nous ne sommes pas contre les évolutions, mais il faut qu'elles aient été validées auparavant et qu'elles ne mettent pas la profession en danger.»
Afin d'assainir son verger qu'il espère sauver, Charles Benedetti est obligé de récolter ses pommes, qu'il vend aux fabricants de jus (8 à 10 cents/kg) et de ramasser ses feuilles. Il n'entend pas recommencer l'expérience.
Le rapport définitif de l'expérimentation a été transmis aux ministères concernés avec un échantillon de pommes du verger témoin. Les producteurs espèrent une ouverture rapide du dialogue.