La chambre sociale de la cour d'appel de Bordeaux a examiné jeudi le dossier d'accusation d'un agriculteur charentais contre Monsanto. Paul François, gravement intoxiqué en 2004 par un herbicide du groupe américain, l'accuse d'être responsable de sa maladie, pour laquelle son assurance n'avait pas voulu prendre en charge sa rechute.
La cour rendra son arrêt le 28 janvier 2010.
En première instance en novembre 2008, Paul François, un agriculteur de Bernac (Charente) âgé de 45 ans, avait obtenu auprès du tribunal des affaires de Sécurité sociale (TASS) d'Angoulême la reconnaissance d'un lien entre la pathologie dont il souffre et son intoxication.
L'assurance accidents des exploitants agricoles (Aaexa) avait fait appel de cette décision.
Paul François avait été empoisonné en avril 2004 en manipulant du Lasso, un herbicide fabriqué par le groupe phytopharmaceutique américain Monsanto, contenant notamment un solvant nocif, le chlorobenzène. Le Lasso est interdit de vente en France depuis le 31 décembre 2007 et son utilisation est proscrite depuis le 18 juin 2008.
L'agriculteur, à la tête d'une exploitation céréalière de 240 ha, avait inhalé ce produit alors qu'il nettoyait la cuve d'un pulvérisateur ayant contenu le produit.
Lors de l'audience d'appel, l'avocate de l'Aaexa, Me Sandrine Surget, a contesté le lien entre la maladie, l'hospitalisation et le premier arrêt de travail de cinq semaines en avril 2004 à la suite de l'inhalation de l'herbicide et de la rechute quelque mois plus tard de Paul François, qui avait de nouveau dû être hospitalisé.
Un argumentaire battu en brèche par l'avocat de l'agriculteur, Me François Lafforgue, qui a affirmé que des analyses notamment pratiquées sur les cheveux de la victime avaient permis de dater l'intoxication.
Cet avocat a mis en cause deux médecins des centres antipoison de Bordeaux et Angers qui sont intervenus lors des hospitalisations de Paul François. Me Lafforgue déplore que ces spécialistes n'aient pas demandé «d'analyses complémentaires», une attitude aberrante, selon l'avocatn compte tenu de la toxicité du produit.
D'autre part, Me Lafforgue a indiqué qu'il avait engagé une action contre la firme Monsanto pour «faute» sur «le manque de renseignements sur la dangerosité du produit» devant le TGI de Lyon. Une première audience de mise en état du dossier se tiendra le 26 janvier 2009.
De son côté, l'exploitant agricole est toujours en arrêt de maladie, «le médecin-conseil de l'Aaexa refuse que je reprenne le travail», a-t-il indiqué.