Greenpeace et le Crii-gen (Comité de recherche et d'information indépendantes sur le génie génétique) mettent de nouveau en cause le maïs génétiquement modifié de Monsanto MON 863, dans une étude publiée mardi.
Selon cette étude du Crii-gen, financée partiellement par Greenpeace et publiée dans la revue américaine Archives of Environmental Contamination and Toxicology, la consommation d'OGM entraîne chez les rats nourris aux OGM des perturbations sur ces «filtres» que sont le foie et les reins.
«Notre contre-expertise a fait apparaître des problèmes hépatiques chez les femelles, qui ont grossi, alors que les mâles connaissaient des problèmes rénaux qui les ont fait maigrir», explique le professeur Gilles-Eric Séralini, membre de la Commission du génie biomoléculaire et chercheur à l'Université de Rouen, par ailleurs président du comité scientifique du Crii-gen.
«Nous appelons les autorités publiques à reprendre les tests sur le maïs et donc à décréter un moratoire sur son usage», a lancé le professeur Seralini en demandant pourquoi les analyses «effectuées par Monsanto étaient restées confidentielles sous couvert de secret industriel».
Greenpeace a dû mener une longue bataille juridique en Allemagne pour obtenir la communication des 1.132 pages de données brutes de l'étude de Monsanto sur le maïs MON 863, qui ont été retraitées par les experts du Crii-gen.
Selon le professeur Seralini, les effets marqués sur le foie des femelles - augmentation des taux de sucre et jusqu'à 40% des graisses dans le sang - et sur la chimie urinaire des mâles, avec des variations importantes des taux de sodium ou de phosphore notamment, sont «identiques à ceux causés par une intoxication aux pesticides».
Or ce type de maïs a «la particularité de produire son propre insecticide tout au long de sa vie. Mais cet insecticide, qui a été modifié pour être intégré au maïs, n'a jamais été testé en l'état: il n'y a donc ni traçabilité ni épidémiologie possibles», souligne le docteur Joël Spirou, spécialisé en médecine environnementale qui a pris part aux contre-expertises.
Monsanto avait fait valoir en 2003 que les écarts dans son étude entre les rats nourris aux OGM et les autres ressortaient de la variabilité naturelle.
Pour les scientifiques du Crii-gen, il aurait fallu mener des tests sur des femelles gestantes et sur leurs petits, afin de mesurer les effets du maïs sur la santé reproductive.
«Ces tests, qui auraient duré de dix-huit mois à deux ans, auraient amoindri l'intérêt économique des OGM», soulignent-ils.
Le MON 863, autorisé en Europe pour l'alimentation animale depuis août 2005 et pour l'homme depuis janvier 2006, est l'objet d'une polémique depuis trois ans. Selon le Crii-gen, il est cultivé essentiellement sur le continent américain et aujourd'hui utilisé un peu partout dans le monde et notamment en Europe pour l'alimentation animale.
Les experts de la Commission du génie biomoléculaire française avaient émis initialement des réserves, avant de conclure après un examen approfondi que les anomalies repérées «s'inscrivaient dans la gamme des variations naturelles».
L'Agence européenne de sécurité alimentaire avait donné un avis positif au MON 863 en avril 2004, le jugeant «aussi sûr que le maïs conventionnel».