Le ministre allemand de l'Agriculture, Horst Seehofer, s'est prononcé lundi en faveur d'un moratoire sur les autorisations de plantes génétiquement modifiées (OGM) dans l'UE, mais la Commission européenne a mis en garde contre de graves conséquences économiques.
«Il vaudrait mieux dans l'immédiat arrêter et voir si la procédure (d'autorisation) est adéquate», a déclaré Horst Seehofer aux journalistes en marge d'une réunion à Bruxelles avec ses collègues européens.
Cette procédure complexe, impliquant à la fois l'Agence européenne de sécurité alimentaire (EFSA), la Commission européenne et le conseil des ministres européens, pose politiquement un «problème» car elle ne tient pas suffisamment compte des préventions de l'opinion à l'égard de ces produits, a-t-il dit.
Actuellement, la Commission fait des propositions aux Etats membres, sur la base d'une recommandation de l'EFSA.
Le fait de laisser aux responsables politiques le soin de trancher de telles questions est «hautement insatisfaisant», a estimé le ministre allemand. «C'est comme si des organes politiques avaient à décider de l'autorisation de médicaments».
Lorsque les ministres ne parviennent pas à dégager une majorité, ce qui est souvent le cas, le dossier repart à la Commission pour décision finale.
Michel Barnier a quant à lui apporté son soutien au ministre allemand sur les mises en culture. La France vient elle-même de suspendre la culture commerciale des OGM, en attendant les conclusions d'une expertise scientifique nationale au début de l'année prochaine.
«Je rejoins mon collègue allemand pour dire qu'il faut prendre son temps, et si possible au niveau européen», afin «de mettre en place des procédures qui soient indiscutables», a dit le ministre français.
Michel Barnier s'est en revanche montré plus réservé concernant une pause dans les autorisations d'importation, alors que les produits OGM comme le soja ou le maïs sont très utilisés dans l'alimentation du bétail en Europe aujourd'hui.
La commissaire à l'Agriculture, Mariann Fischer Boel, a pour sa part critiqué l'idée d'un moratoire, lors d'une conférence de presse.
«Un report de toutes les nouvelles autorisations aura des conséquences très importantes» sur le secteur agricole européen, en augmentant en particulier le prix des ''céréales'' nécessaires à l'alimentation du bétail, comme le maïs ou le soja (les produits OGM, moins chers, se voyant interdire l'accès au marché), et donc in fine le prix de la viande.
Elle a fait valoir que le prix du maïs dans l'UE était déjà aujourd'hui supérieur de 55% à celui en vigueur aux Etats-Unis, où les cultures transgéniques sont largement répandues. «Le résultat (d'un moratoire) serait que la production de viande quitterait l'Europe», a averti la commissaire.
Un moratoire aurait aussi toutes les chances d'être attaqué par les partenaires de l'UE devant l'Organisation mondiale du commerce (OMC), comme ce fut le cas avec le précédent moratoire européen entre 1999 et 2004.
Les pays de l'UE, confrontés aux inquiétudes de leurs opinions publiques, sont actuellement très divisés sur la question des OGM.
Une demande du groupe BASF pour produire une pomme de terre transgénique, dont les résidus seraient destinés à l'alimentation animale, est actuellement bloquée en dépit d'un avis favorable de l'EFSA.
Le commissaire à l'Environnement, Stavros Dimas, est par ailleurs opposé à l'autorisation de la culture de deux variétés de maïs transgénique, là encore en dépit d'avis positifs de l'EFSA.