Les Etats-Unis ont annoncé jeudi qu'ils allaient tripler les droits de douane imposés aux importations de roquefort, une sanction prise en rétorsion de l'interdiction par Bruxelles du boeuf aux hormones américain.
«La représentante américaine au Commerce (USTR) modifie la liste des produits de l'UE sujets à des droits de douane supplémentaires en lien avec» le conflit du boeuf aux hormones devant l'OMC, ont indiqué les services du Commerce extérieur à Washington dans un communiqué.
Ces modifications «changent les Etats membres de l'UE dont les produits sont sujets à des droits de douane, et pour un produit, accroissent le montant des droits supplémentaires», a ajouté l'USTR.
Ce produit est le roquefort, dont les droits de douane passeront de 100 à 300% à partir du 23 mars 2009.
Cette décision est en conformité avec les règles de l'OMC, qui le 16 octobre 2008 avait jugé en appel que les sanctions prises par les Etats-Unis et le Canada contre les produits européens étaient légales.
«Les droits de douane existants ont été imposés pendant plus de neuf ans. Le but de ces modifications est d'atteindre un compromis dans ce différend grâce auquel l'UE autoriserait l'accès au marché du boeuf américain et les Etats-Unis pourraient mettre un terme à leur politique douanière», a expliqué Washington.
De son côté, la Commission européenne a annoncé jeudi qu'elle envisage de porter plainte à l'OMC contre les Etats-Unis.
«Il est clair que cette décision de l'Administration américaine signifie que nous n'aurons pas d'autre choix que de commencer à nous préparer pour porter cette affaire devant l'OMC», a indiqué la Commission dans un communiqué.
Les professionnels ne se font pas d'illusion. «On était déjà taxé à 100% depuis neuf ans, alors maintenant avec 300% on a fini de vendre du roquefort aux USA», a déploré le président de la Confédération générale du roquefort, Robert Glandières.
«On a consenti un effort financier depuis des années pensant qu'il était plus difficile de rentrer à nouveau sur un marché que d'y rester même à perte, mais on s'est peut-être trompé; c'est fini on n'en enverra plus là-bas», a déclaré M. Glandières, estimant que «c'était dans les tuyaux de l'administration Bush depuis longtemps et ils l'on fait avant de partir».
Selon M. Glandières, les exportations de roquefort vers les Etats-Unis étaient de 400 tonnes par an, soit environ 2% de la production. Elles représentent 1,6 million de litres de lait transformés pour un volume global de 90 millions de litres de lait produit.
«C'est frustrant que ce soit encore nous qui devions pâtir de ces mesures de rétorsion de la part des Etats-Unis», a regretté Béatrice Weirich, porte-parole de la fédération régionale du syndicat des éleveurs de brebis (FNSEA).
«Cela coûtait déjà excessivement cher à la filière de maintenir le roquefort là-bas malgré les taxes, donc des droits de douane qui passent à 300% nous excluent de fait du marché américain», a-t-elle ajouté. «Le roquefort est un symbole français et on paie sa notoriété», a-t-elle encore estimé.
«Des efforts importants ont été faits pour trouver un règlement accepté par les différentes parties dans ce conflit en cours. Cette tâche est maintenant rendue beaucoup plus difficile», a-t-elle ajouté.