La Commission européenne a relativisé, lundi, l'importance d'une offensive lancée par cinq pays, dont les trois plus grands de l'UE – la France, l'Allemagne et la Grande-Bretagne – en vue d'obtenir un gel du budget de l'Union jusqu'en 2020.
Il s'agit d'« une position préliminaire de cinq Etats membres, il en reste vingt-deux », a souligné la porte-parole de l'exécutif européen, Pia Ahrenkilde, lors d'un point de presse.
« La Commission va prendre en compte de nombreux points de vue dans la formulation de propositions législatives à l'été prochain », sur le montant du prochain budget et les enveloppes prévues pour les différents domaines, mais pour l'heure « nous n'avons pas reçu encore de lettre des vingt-deux autres Etats membres », a-t-elle souligné.
La porte-parole a estimé qu'avant de parler chiffres il convenait d'abord d'identifier les priorités de l'UE pour l'avenir. « Il est essentiel de parler des priorités, des objectifs et puis bien sûr d'argent », a-t-elle dit, mais « actuellement, nous n'en sommes pas là », pour ce qui est des questions financières.
Cinq dirigeants européens, dont le français Nicolas Sarkozy, l'allemande Angela Merkel et le britannique David Cameron, ont réclamé un gel du budget de l'UE jusqu'en 2020, au nom de l'austérité, dans une lettre rendue publique samedi.
Les Premiers ministres Mark Rutte (Pays-Bas) et Mario Kiviniemi (Finlande) ont signé également cette lettre, adressée au président de la Commission, José Manuel Barroso.
Cette alliance des trois principaux contributeurs au budget européen vise à 'geler en termes réels' le budget de l'UE jusqu'en 2020. C'est-à-dire à faire en sorte qu'il n'augmente pas plus que l'inflation.
Cet appel vaut pour les années 2012 et 2013, qui marquent la fin du budget pluriannuel en cours de l'UE (négocié sur sept ans d'affilée), et pour la période suivante (2014-2020).
Les négociations pour le prochain budget des 27 doivent commencer l'an prochain. Le budget actuel de l'UE représente environ 1 % du produit intérieur brut (PIB) européen, soit 143 milliards d'euros environ par an, et quelque 1.000 milliards d'euros sur sept ans.
L'alliance scellée entre Londres, Paris et Berlin est interprétée par certains diplomates comme un pacte de non-agression qui verrait la France et l'Allemagne s'assurer un maintien des aides agricoles dans le prochain budget, et d'autre part le Royaume-Uni conserver son « rabais » sur sa contribution nationale.
Du coup, les pays d'Europe de l'Est craignent d'en faire les frais, via une baisse d'un autre budget très important, celui des aides aux régions défavorisées, dont ils profitent beaucoup.
Le ministre hongrois des Affaires étrangères, Janos Martonyi, dont le pays va assurer à partir de janvier 2011 la présidence semestrielle tournante de l'Union européenne, a appelé lundi Bruxelles « à ne pas mettre la charrue avant les bœufs », en parlant gros sous avant de parler projets.
« Nous devons avoir une discussion approfondie sur la substance » de ce que veut faire l'UE, a-t-il dit.
Au Parlement européen, l'initiative tripartite a été peu appréciée, y compris dans les rangs même du parti de droite du président Sarkozy.
« Si la politique financière de l'Union se décide en fait à Berlin, sa politique budgétaire à Londres, sa politique agricole à Paris, sa politique régionale à Varsovie, sa sécurité militaire à Washington, son approvisionnement énergétique à Moscou, et son avenir nulle part, alors, il n'y a plus d'Europe ! », s'est ainsi insurgé Alain Lamassoure, président de la commission des budgets du Parlement européen.
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