« L'agriculture est un élément de double solution, capable de porter à la fois un objectif de lutte contre le changement climatique et de sécurité alimentaire », a martelé Stéphane Le Foll en conférence à l'Inra mardi, en marge d'un colloque consacré au changement climatique à l'Unesco. Une solution prônant seulement la diminution du cheptel ruminant et de la consommation de viande risquerait de ne pas susciter l'adhésion des pays en développement : « Pour obtenir l'adhésion de tous les pays à un accord sur le climat à Paris en décembre, il faut proposer un projet capable de combiner les enjeux de lutte contre le changement climatique et de développement agricole, qui permet aussi le développement économique et social », a souligné le ministre.
Le programme « 4 pour 1.000 », qui vise à accroître de 0,4 % par an le stock mondial de carbone dans les sols répond à ce double défi. il s'agit de faire d'une pierre deux coups en diminuant le stock de gaz à effet de serre dans l'atmosphère et en augmentant la matière organique des sols, donc leur fertilité. Ce programme, proposé dans les jours précédents à la Banque mondiale, « est inscrit à l'agenda des solutions de la COP21 », a indiqué le ministre, ce qui signifie qu'« on n'est plus dans les discours théoriques, on entre dans la pratique ».
Evaluer et cartographier les puits de carbone potentiels
Des scientifiques du monde entier contribueront à évaluer et cartographier les puits de carbone potentiels et à identifier les méthodes et pratiques à mettre en œuvre pour augmenter leur stock de carbone.
Lorsque Stéphane le Foll avait annoncé le lancement de ce programme en mars, à Montpellier, le conseil scientifique du programme GESSOL (programme de recherche français exclusivement consacré aux sols) avait salué cette intiative, reconnaissant « un intérêt majeur » à ce programme. Il avait cependant souligné « les difficultés et limites d'un tel stockage » de carbone par le sol, expliquant que « les sols peuvent effectivement stocker de grandes quantités de carbone, et si certaines pratiques permettent une augmentation relative des stocks de l'ordre de 4 pour 1.000 par an, celle-ci reste réversible et limitée dans le temps car les sols atteignent un nouvel équilibre après quelques décennies. L'arrêt de la pratique stockante se traduit alors par une perte de carbone. »
Le conseil scientifique expliquait également que le stockage du carbone nécessitait une disponibilité suffisante d'autres nutriments tels que l'azote, et que certaines pratiques favorables au stockage pouvaient avoir d'autres effets indésirables, comme l'émission d'autres gaz à effet de serre. Tout en confirmant l'intérêt d'une politique visant à augmenter le stock de carbone des sols, il concluait que la « priorité doit rester la sobriété énergétique et la réduction des émissions liées à nos activités ».