Le frelon asiatique, une espèce invasive qui menace les ruchers européens, pourrait être éradiqué grâce aux travaux de chercheurs tourangeaux, un espoir pour les apiculteurs français qui tiendront leur 20 congrès du 10 au 12 octobre 2014 à Colmar (Haut-Rhin).
Éric Darrouzet, enseignant-chercheur à l'Institut de recherche sur la biologie de l'insecte (IRBI) de l'Université de Tours, a découvert avec son équipe Conops vesicularis, une espèce parasitoïde, sorte de petite mouche qui pond son œuf au printemps sur des reines frelons. « L'œuf éclot, et la larve, comme l'Alien du film, va se développer dans l'abdomen de son hôte, ce qui va entraîner au bout de dix ou quinze jours la mort de la reine. »
Cette découverte est essentielle car si ce parasite tue la reine, la colonie entière ne lui survit pas. Les chercheurs peuvent désormais imaginer mettre au point un système de lutte biologique contre le frelon asiatique.
« Il faudra des années pour démontrer que ce parasitoïde a une préférence pour le frelon asiatique et qu'il n'entraînera pas de dégâts collatéraux sur les abeilles, les bourdons et les guêpes », tempère néanmoins Éric Darrouzet, qui travaille aussi sur plusieurs types de pièges.
« Un des buts de notre projet est la fabrication d'un piège sélectif. Il pourrait être mis à la disposition des professionnels de l'apiculture et des amateurs pour protéger leurs ruchers », explique-t-il.
De nouveaux pièges en développement
Éric Darrouzet reste discret sur les avancées de ses recherches. Avec son équipe, il travaille sur l'architecture d'un piège pour qu'il soit plus sélectif, malgré l'utilisation d'un appât non sélectif. « Un prototype est déjà à 99 % sélectif. A la fin de 2015, nous devrions avoir un piège sélectif disponible », prédit-il.
Un appât, lui aussi sélectif, pourrait également voir le jour. « On veut remplacer les appâts alimentaires à base de sucre et de protéines par un appât phéromonal (ndlr : issu d'une sécrétion externe produite par un organisme) à base de molécules volatiles émises par les frelons. On teste actuellement ces molécules isolées en laboratoire. On le fera dès l'année prochaine sur le terrain. L'objectif est de labelliser et de faire breveter ces pièges. Mais il nous faudra pour ça des finances », prévient le chercheur.
70 % du territoire colonisés
Vespa velutina, communément appelée frelon asiatique, est arrivée en France il y a une dizaine d'années.
« Cette espèce pose de gros soucis car elle se nourrit de nombreux insectes, dont les abeilles. C'est une catastrophe pour les apiculteurs. Mais aussi pour la biodiversité, car ce prédateur généraliste chasse divers insectes. De plus, sa piqûre peut être mortelle », expose le scientifique.
Selon lui, cette espèce invasive se répand de plus en plus en Europe, et même en Europe de l'Est, épargnée jusqu'ici. Plus de 70 % du territoire français sont colonisés : c'est dire si les apiculteurs français seront intéressés par l'exposé que fera Éric Darrouzet à leur 20e congrès à Colmar.
De 300 à 400 colonies en Indre-et-Loire
Sur le seul département de l'Indre-et-Loire, l'augmentation du nombre des colonies de frelons est exponentielle. L'espèce est arrivée près de Tours en 2009. Les chercheurs avaient relevé trois colonies. En 2011, il y en avait quarante et le recensement de 2013 fait état de 400 à 600 colonies.
Et les surprises ne manquent pas car le frelon asiatique construit son nid un peu partout. On peut en trouver dans des cavités souterraines, sous des toits, dans des greniers, dans des buissons à hauteur d'homme, sur des façades de maison, ou encore dans des arbres jusqu'à plus de 20 mètres de hauteur.
Éric Darrouzet possède aussi une collection exceptionnelle de nids qu'il analyse aux rayons X pour percer les secrets de leur architecture sans les détruire.