Les ministres de l'Agriculture du G20 réunis à Paris ont signé jeudi un accord sur un « plan d'action sur la volatilité des prix alimentaires et sur l'agriculture ». Il comporte cinq volets touchant à l'investissement dans l'agriculture, la transparence sur les stocks de matières premières agricoles, la protection des pays les plus fragiles contre les excès de la volatilité, la coopération internationale et la régulation financière. Une liste de vœux, émaillée de quelques décisions concrètes.
Les vingt premières puissances économiques du monde « reconnaissent » la nécessité d'agir dans les différents domaines évoqués, « réaffirment » des vérités essentielles telles que le droit de se nourrir, « rappellent » l'urgence de la situation, « insistent » sur la nécessité de faire des progrès, et « invitent » ou « encouragent » les autres instances internationales à se saisir du problème. Si leurs engagements se bornent souvent à « favoriser » ou « soutenir » des initiatives, quelques décisions concrètes ont cependant été adoptées, assorties d'un calendrier.
Une Initiative internationale de recherche pour l'amélioration du blé (IRIWI) coordonnera « les efforts de recherche sur l'amélioration du blé tendre et du blé dur en génomique, génétique et agronomie ». Le projet devrait être lancé lors d'une réunion le 15 septembre à Paris. Un document stratégique présentant l'initiative sera rédigé d'ici à janvier 2012.
La mise en place d'une base de données mondiales sur la production agricole, la consommation et l'état des stocks, baptisée AMIS, est lancée. Le secrétariat d'AMIS, qui comprend plusieurs organisations internationales et sera hébergé à la FAO (Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture), est mis en place dès ce mois-ci. Le plan prévoit que les premières perspectives de marché mondial de l'alimentation soient publiées par AMIS avant juin 2012. Les pays en développement, en particulier l'Inde et la Chine, bénéficient d'un délai plus long pour entrer dans le programme.
Les membres du G20 ont décidé de lancer « un réseau volontaire international de suivi de la production agricole reposant sur des données satellitaires », afin de collecter des informations plus précises sur les prévisions de cultures. La stratégie doit être élaborée avant juin 2012.
Le G20 décide de mettre en place un « Forum de réaction rapide » afin de prendre des décisions collectives en cas de crise, au lieu de décisions unilatérales risquant de déstabiliser le marché mondial. Il sera hébergé à la FAO et travaillera notamment avec les données d'AMIS. Une première réunion est prévue au second semestre de 2011.
Réactions diverses
Le G20 a également convenu de supprimer les interdictions d'exporter s'appliquant à l'aide alimentaire mondiale. Pour aider les pays en développement à faire face à la volatilité des prix, le G20 encourage l'initiative de la Banque mondiale qui lance un produit pour se couvrir contre les risques de volatilité et encourage les différents acteurs à développer des projets pilotes. Cas identique pour la mise en place de réserves alimentaires d'urgence : la balle est renvoyée aux instances internationales chargées d'élaborer et de tester un projet pilote.
Sur la régulation financière, les ministres de l'agriculture du G20 « [encouragent] fortement les ministres des Finances et les gouverneurs de banques centrales du G20 à prendre les décisions appropriées ».
Par ailleurs, il est à noter que le cycle de Doha n'est pas mort : les pays du G20 rappellent leur attachement à l'OMC et soulignent la nécessité de voir aboutir le cycle de Doha.
Un suivi des mesures décidées est prévu, notamment par la présidence mexicaine. Et l'agriculture devrait désormais être maintenue à l'agenda du G20.
Les réactions n'ont pas tardé. En France, les chambres d'agriculture saluent la réussite de cette négociation « qui a rétabli l'agriculture à sa juste place stratégique ». Le Copa-Cogeca (syndicats et coopératives européennes) tient un discours comparable. L'ONG Coordination Sud, elle, est clairement déçue : « Le G20 préfère l'agrobusiness aux consommateurs et aux paysans », en refusant de s'attaquer aux causes structurelles de l'insécurité alimentaire. L'ONG Oxfam regrette également que les questions essentielles soient seulement survolées : « croiser les doigts et espérer que la crise finira par disparaître n'est pas suffisant ». La société de conseil Agritel, elle, salue l'initiative du G20 pour les pays en développement mais affirme qu'« on ne viendra jamais à bout de la volatilité ».
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