Les éleveurs de la filière laitière, en grève depuis une semaine, se préparent à une «journée blanche» vendredi avec un épandage «massif» de leur production, en dépit des nouvelles propositions de Bruxelles destinées à répondre à leur inquiétude sur la baisse des prix du lait.
Un rassemblement «gigantesque» avec déversement de centaines de milliers de litres de lait est, entre autres, annoncé à Tanis, dans la Manche, où «plus de 500 tracteurs épandront le lait avec en toile de fond le mont Saint-Michel», selon un communiqué de l'Organisation des producteurs de lait (OPL).
«Il y aura une manifestation dans toutes les régions au même moment vendredi, par obligation, pour démontrer qu'on fait plus que les 7% de grévistes, comme le dit M. Lemétayer», a expliqué Pascal Massol, président de l'Association des producteurs laitiers indépendant (Apli), accusant le président de la FNSEA de faire «l'intoxication avec les industriels».
Une semaine après son déclenchement, l'impact de la grève du lait reste toutefois très difficile à mesurer. Selon qu'ils émanent des industriels et syndicalistes non grévistes ou des producteurs favorables au mouvement, les chiffres de participation sont d'ailleurs extrêmement contrastés, allant de «5 à 10%» à «plus de 50% de grévistes».
Dans le Charente, Philippe Varacher, membre de l'Apli et producteur à Verneuil, estimait à 40% jeudi le nombre de grévistes, contre 10% au début du mouvement. «On va vers les 60%», assure-t-il.
«On s'achemine vers un blocage complet des laiteries ce week-end par manque de lait. C'est du jamais-vu», a affirmé de son côté Yves Leperlier, président de la commission laitière de la Confédération paysanne.
Dans le Midi-Pyrénées, le secrétaire général de la branche laitière de la FRSEA (hostile à la grève), Jean Doumeng, a jugé «très exagérée» l'évaluation de 50% de grévistes dans sa région, mais a reconnu qu'il manquait un quart de la collecte chez Danone à Villecomtal, dans le Gers, et chez Bongrain dans les Pyrénées-Atlantiques.
Au niveau national, la Fédération des producteurs laitiers (FNPL), branche spécialisée de la FNSEA, évalue le «refus de livraison», autrement dit le taux de grévistes, entre 5 et 10%.
Du côté des industriels, l'Association de la transformation laitière française (Atla), qui réunit les laiteries privées et les coopératives, a maintenu jeudi les chiffres annoncés la veille, avec une collecte en baisse de 7-8% par rapport à l'an dernier à la même époque.
Pour répondre à la détresse des agriculteurs, qui vendent leur lait à un prix souvent inférieur aux coûts de production, la Commission européenne a proposé jeudi une série de mesures dont un assouplissement des règles de recours à des sortes de «primes à la casse» pour la restructuration du secteur.
Mais elle n'envisage pas de revenir sur l'abolition du système des quotas, pourtant jugée indispensable par les grévistes, pour endiguer la production.
Le président de la FNSEA, Jean-Michel Lemétayer, a estimé jeudi en marge du salon de l'élevage (Space) à Rennes que ces propositions n'étaient «pas supportables» et a demandé «le départ» de la commissaire européenne.
En attendant, les actions se sont poursuivies jeudi. Dans le Calvados, à Isigny-sur-mer, environ 300.000 litres de lait ont été épandus, selon les gendarmes et un membre de l'Apli.
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