«Les marchés agricoles mondiaux ne sont pas assez régulés», a déclaré le ministre français de l'Agriculture Bruno Le Maire, après avoir entendu la complainte d'un producteur américain de lait, qui pâtit comme ses homologues européens de la baisse des cours.
Confronté en France au mécontentement des producteurs laitiers, Bruno Le Maire est venu se rendre compte vendredi dans le Maryland (est des Etats-Unis) de la situation de la filière de l'autre côté de l'Atlantique.
«Quand un gallon (3,78 litres) d'eau devient plus cher qu'un gallon de lait, c'est qu'il y a quelque chose qui ne tourne pas rond dans notre système», explique Chuck Fry, producteur laitier à Tuscarora (Maryland), à 80 km au nord-ouest de Washington.
En raison de la chute des prix du lait, ce responsable du syndicat agricole Farm Bureau dit avoir perdu 100.000 dollars de chiffre d'affaires depuis le début de l'année dans son exploitation de 170 vaches laitières.
«Je le reconnais, c'est absurde. Les marchés agricoles mondiaux ne sont pas assez régulés. C'est un problème mondial», lui a répondu le ministre, venu voir sur le terrain comment les Etats-Unis gèrent la fluctuation des prix agricoles et les excédents.
«Il faut arriver à stabiliser les prix et les revenus. Cela doit être un objectif mondial», a poursuivi le ministre, ajoutant retrouver avec «les préoccupations d'un fermier américain, les mêmes inquiétudes» que chez lui «en Normandie».
Au sein de l'Union européenne, de nombreux Etats membres, emmenés par la France et l'Allemagne, souhaitent qu'on envisage «un cadre régulé» du marché du lait alors que les quotas laitiers doivent totalement disparaître en 2013.
«Il faut abandonner l'illusion du libéralisme en matière agricole pour mettre sur pied un mouvement de régulation et les Américains ouvrent le même genre de réflexion», a encore affirmé le ministre lors d'une conférence au terme de sa visite à Washington.
Il prône un système de contrats à long terme entre producteurs et industriels, qui puissent assurer une visibilité de revenus aux agriculteurs. «L'Europe doit cesser de tourner sur son axe et reprendre le sens des réalités lorsqu'un secteur connaît une crise importante», a-t-il ajouté.
Le ministre, qui a rencontré à Washington son homologue américain Tom Vilsack, a évoqué avec lui les outils d'aide gouvernementale américaine au secteur agricole, notamment via l'aide alimentaire aux écoles.
Bruno Le Maire a ainsi partagé le repas d'écoliers lors de la visite d'une école à Poolesville (Maryland), des repas fournis principalement par une aide soit financière, soit en nature du ministère de l'Agriculture (USDA).
L'USDA consacre 60% de son budget de quelque 100 milliards de dollars à l'aide alimentaire nationale, sous forme de financement de repas équilibrés à l'école, à midi, au petit-déjeuner ou sous forme de bons alimentaires.
Quelque 30 millions d'enfants en bénéficient et cela permet de soutenir les prix en achetant exclusivement des produits américains. «Cela vaut le coup de regarder ce qui se fait», a commenté le ministre français. «Cela fait partie des choses qu'il faut travailler. C'est une idée que je souhaite proposer à l'Europe le moment venu», a-t-il indiqué.
«Dans les écoles américaines, tous les produits sont exclusivement américains alors qu'en Europe cela vient de là où c'est le moins cher», a-t-il ajouté, plaidant pour «un lien plus étroit entre les producteurs agricoles et les collectivités».