« La recherche doit venir chez nous. En cinq ans, je n'ai vu personne chez moi », a expliqué Jean-Marc Onno, agriculteur méthaniseur membre de l'AAMF (1), au premier soir des « troisièmes Journées recherche et industrie biogaz et méthanisation », mercredi à Rennes (2).
Si cette déclaration paraît sévère, elle reflète en partie la teneur des échanges de l'après-midi, et la situation de la méthanisation agricole en France, qui ne décolle pas au rythme que souhaite voir le gouvernement. Seulement 50 installations agricoles et centralisées sont comptabilisées par l'Ademe (3) chaque année entre 2010 et 2014. Loin de l'ambition de Stéphane Le Foll et Ségolène Royal : respectivement 1.000 installations agricoles d'ici à 2020 avec le plan EMAA (4) et 1.500 installations en trois ans, toutes filières confondues.
« C'est la première fois que j'entends parler de ces journées »
Car malgré la qualité des présentations, et l'intérêt incontestable de plusieurs d'entre elles d'un point de vue de la recherche appliquée, l'impression demeure qu'il y a un vide entre les problèmes rencontrés par les agriculteurs méthaniseurs, en matière de rentabilité notamment, et les recherches des industriels ou des chercheurs.
Ce que n'a pas manqué de mettre en lumière Carine Pessiot, chargée des questions concernant la méthanisation à la chambre d'agriculture de la Bretagne. « C'est la première fois que j'entends parler de ces journées recherche et industrie », a-t-elle lancé aux quelque 230 participants. Avant d'ajouter, à propos des interventions en binôme agriculteur-industriel/chercheur : « On voit qu'il manque du lien entre vous » ; « nous avons besoin de parler ensemble avec les mêmes mots », a-t-elle reproché.
Peu avant, c'est Guillaume Bastide, du service de la prévention et de la gestion des déchets à l'Ademe, qui ouvrait le sujet. « Il y a une collaboration chercheurs-industriels-exploitants agricoles à renforcer ». « Les appels d'offre de l'Ademe privilégient d'ailleurs les projets de démonstration en ce sens », a-t-il ajouté, avant de nuancer ses propos : « La recherche se déroule sur des années alors que l'exploitant veut un résultat de suite, tout comme l'Ademe. Pour y parvenir, il faut continuer à collaborer. »
Ce sur quoi Jean-Marc Onno a rebondi : « On n'a pas eu beaucoup de travail en commun. Ce qui serait bien, ce serait des groupes tripartites de travail régionaux chercheurs-méthaniseurs-prescripteurs ». Il reste à voir si cette proposition, issue d'une expertise de terrain, sera entendue.
_____
(1) Association des agriculteurs méthaniseurs de France.
(2) Plus de 230 participants se donnent rendez-vous à Rennes pour trois jours d'exposés et de débats sur la recherche appliquée pour la méthanisation ces 3, 4 et 5 février 2015.
(3) Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie.
(4) Energie méthanisation autonomie azote.