Les fermiers et métayers de la FNSEA (SNFM) ont consacré leur 65e congrès, à Amiens (Somme) les 6 et 7 février 2013, à l'environnement. Ils sont touchés comme les autres agriculteurs par l'empilement de textes réglementaires et de contraintes pas toujours frappés au coin du bon sens.
Mais, pour Sylvie Le Brun, la présidente de la SNFM, « quand on est fermier, c'est pire. Le bail ne nous donne pas plus de droit que les exploitants en faire-valoir direct. Or certains pensent, notamment les collectivités locales, que le bail rural n'est pas compatible avec tous les zonages environnementaux (Natura 2000, zones vulnérables...) ». Et pour que toutes les nouvelles règles soient bien assurées par les fermiers, elle appelle le gouvernement et les collectivités à davantage de concertation. « Le plus souvent, nous ne sommes pas au courant des nouveaux zonages ou des nouvelles normes », regrette-t-elle.
Déjà en 2006, face à cette suspicion à l'encontre des preneurs, la SNFM avait accepté l'introduction de clauses environnementales dans le bail rural. « A l'époque, il fallait éviter les expropriations à tout va et les tentations de conclure des contrats en dehors du statut du fermage », a expliqué Sylvie Le Brun. Mais presque sept ans après la loi de modernisation agricole, les fermiers constatent les limites de ce contrat : « Il y a ceux qui ont un contrat vertueux, et les autres. » Finalement, la suspicion s'est accentuée et les zones dans lesquelles ce « bail environnemental » est possible ont tendance à s'élargir. « Nous demandons à ce que ces clauses soient limitées à des zonages reconnus », a souligné la présidente, qui réclame également une « indemnisation pérenne », puisque la protection de l'environnement se fait sur une longue durée, qui « ne repose pas sur les bailleurs qui, eux aussi, peuvent subir une dépréciation de leur bien qui doit être indemnisée ».
« Il faut changer de paradigme sur les indemnisations. L'Etat ne peut pas tout. Nous devons travailler sur le deuxième pilier de la Pac à un contrat qui permette la libre entreprise », a renchéri Pascal Ferey, le vice-président de la FNSEA. Pour lui, il est temps pour le gouvernement de « sortir du bois » : « Qu'est-ce qu'il attend de nous ? », « Le ministre de l'Agriculture doit redevenir le ministre des agriculteurs » et dire « Quel impact positif les agriculteurs peuvent apporter au-delà de l'agroécologie ». Il prône une obligation de résultat plutôt que de moyens et met en garde le gouvernement : « Il ne faut pas que ce millefeuilles réglementaire amène à ce que les agriculteurs se retirent de ces terres, comme c'est déjà le cas sur certains territoires. » Territoires souvent occupés par des éleveurs, par ailleurs durement frappés ces dernières années.
Lionel Manteau, avocat honoraire et président de l'Association française de droit rural (AFDR) Picardie, a aussi encouragé les agriculteurs à changer de paradigme, « à être force de proposition » concernant les compensations écologiques. « A défaut, les agriculteurs se feront imposer des mesures de protection par la loi et ils n'en auront plus la maîtrise », a-t-il prédit. « La profession doit se mettre en avant et être acteur », a-t-il insisté. Pour lui, il faut passer par la contractualisation. Lorsque c'est un fermier qui exploite les terres, il préconise un contrat tripartite entre le maître d'ouvrage qui indemnisera le bailleur et le fermier, plutôt que deux contrats successifs, le premier entre le maître d'ouvrage et le propriétaire-bailleur et le second entre le bailleur et le preneur, pour que les mesures et l'indemnisations soient concertées.
Les fermiers et métayers de la FNSEA sont en ordre de bataille en vue de la loi d'avenir agricole programmée pour la fin de l'année.