Désormais, pour recevoir des aides de la région, les exploitants de Poitou-Charentes doivent s’engager à ne pas cultiver, ni acheter d’OGM. La mesure est d’autant moins acceptée qu’elle est rétroactive.
«En sport de combat, cela s’appelle une prise en traître». Alain Chabauty, président de la section bovine régionale, exprime le sentiment général chez les éleveurs de la région, après la modification apportée en septembre dernier aux conditions d’attribution des subventions par la région Poitou-Charentes.
Comme 200 à 300 exploitants, il se considère comme piégé. Les demandes de subvention avaient été faites depuis longtemps, certains bâtiments pour lesquels ces subventions avaient été demandées étaient même réalisés. Pourtant, une décision est venue changer la donne: «La région Poitou-Charentes ne soutiendra que les projets portés par des éleveurs qui s’engageront par écrit à ne pas cultiver de plantes génétiquement modifiées sur leur exploitation et à ne pas utiliser, pour l’alimentation de leurs cheptels, d’aliments contenant des organismes génétiquement modifiés».
«C’est un choix politique de la région que nous ne partageons pas», souligne Philippe Moinard, président de la FRSEA. «Mais au-delà du choix politique, la décision est rétroactive et nous est imposée sur tous les dossiers depuis août 2006, alors qu’ils n’ont pas été montés avec cette condition.» Pour Alain Chabauty, les éleveurs n’ont pas d’autre possibilité que de signer le contrat demandé par la région, puisque les investissements qui lui sont liés sont réalisés ou en cours. Au risque, pour les signataires, de s’en dédire.
Certes, ne pas cultiver d’OGM est tout à fait possible. Mais les bannir de l’alimentation, en revanche, est bien plus complexe et représente un surcoût. De plus, le marché du soja non OGM est inexistant. «Obliger les gens à en trouver est utopique», estime Alain Chabauty. «Ce serait plus malin de mettre en place des mesures incitatives à la production locale de protéagineux.»
Alain Chabauty a d'ailleurs calculé le surcoût alimentaire que représente la condition imposée par la région. Il est de l’ordre de 20 €/t pour un aliment sans soja OGM, et pourrait même monter à 50 €/t dans les prochaines années. Comme l’engagement des éleveurs porte sur toute la durée d’amortissement du bâtiment, l’aide, plafonnée à 7.000 euros, couvre tout juste ce surcoût alimentaire.