La France s'est saisie mercredi de l'échec des négociations à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) pour défendre une forme d'exception agricole, en suggérant d'ouvrir à d'autres enceintes les discussions sur l'agriculture.
Critiquant le refus des grands pays émergents de faire les «efforts» nécessaires, le ministre français de l'Agriculture, Michel Barnier, a jugé mercredi que la «leçon à tirer», c'est que «les produits agricoles ne sont pas des biens comme les autres» mais un «actif stratégique».
«Est-ce que l'agriculture et l'alimentation, c'est seulement à l'OMC qu'il faut en discuter ?», s'est-il interrogé. «Est-ce qu'il n'y a pas d'autres enceintes où on peut discuter de ce lien entre agriculture et alimentation pour le développement, contre la faim et pour la reconstruction des pays agricoles les plus pauvres ?»
Dans un entretien au Monde daté de jeudi, il a notamment cité l'Organisation de l'ONU pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), le Fonds monétaire international (FMI) ou la Banque mondiale.
Pour la secrétaire d'Etat au Commerce extérieur, Anne-Marie Idrac, des négociations entre 153 pays «sur tous les sujets commerciaux», c'est «devenu inatteignable». «Les discussions internationales sur l'agriculture ne doivent pas être réduites à une seule perspective commerciale», a-t-on expliqué dans son entourage.
Si l'OMC est compétente en matière de tarifs et d'aides à l'exportation, elle ne l'est pas en matière d'aides à la production, a rappelé une source proche de la négociation.
«Il y a un acquis de règles de l'OMC qui continue à fonctionner. Mais si on cherche à créer des dynamiques de discussions avec les pays émergents et les pays pauvres, ce ne sera pas à l'OMC, au moins dans les semaines qui viennent», a dit cette source.
Et d'ajouter, encore plus clairement: «On souhaitait que l'OMC soit l'instrument qui permette d'aller plus loin, ça n'a pas marché, donc il va falloir regarder ailleurs».
«Personne n'a jamais pensé qu'on allait régler tous les problèmes agricoles à l'OMC», a rappelé Lionel Fontagné, professeur d'économie à l'Université de Paris I. «Des instances comme la Banque mondiale ou la FAO vont prendre du poids sur les sujets agricoles, mais ça ne veut pas dire pour autant qu'on doive sortir de l'OMC. Les pays en développement ont besoin d'un accès au marché agricole, il est crucial pour eux de sécuriser le commerce au niveau mondial», a-t-il expliqué.