Dans un contexte de mondialisation, de forte volatilité des prix des matières premières, de dérèglement climatique et de raréfaction des ressources naturelles, Vincent Chatellier, chercheur à l'Inra, propose une réflexion synthétique et prospective sur les mécanismes européens de régulation des marchés agricoles.
Cette étude a été réalisée à la demande des commissions de l'agriculture et du développement rural du Parlement européen. Elle s’inscrit dans la perspective des débats engagés sur l’avenir de la Pac après 2013.
Dans cette note, Vincent Chatellier précise les principales raisons qui justifient «l’existence d’une intervention publique ambitieuse dans ce secteur économique si singulier (sensibilité de l’offre aux aléas climatiques, faible élasticité de la demande par rapport aux prix, production de biens alimentaires essentiels à la vie, fourniture de services non marchands, etc.)» et propose des pistes d’avenir pour les principaux mécanismes de régulation qui fondent la Pac.
Ces pistes sont les suivantes:
- droits de douane (ou, plus globalement, protections à la frontière),
- soutiens aux exportations (restitutions et aide alimentaire),
- filets de sécurité (ou maintien de prix institutionnels minimaux),
- outils de gestion des risques,
- instruments de contrôle de l’offre (en insistant tout particulièrement sur les quotas laitiers),
- aides directes allouées aux agriculteurs.
«De nouvelles adaptations de la Pac seront indispensables à moyen terme, avec ou sans la pression de l’OMC», souligne le chercheur. Pour lui, la Pac doit être mise encore davantage au service d’une agriculture productive, innovante, compétitive, respectueuse de l’environnement et soucieuse de ses territoires.
«Elle va donc devoir progressivement se détourner d’une logique qui veut que les paiements directs alloués aux agriculteurs dépendent surtout des montants d’aides qu’ils ont pu percevoir dans le passé. Cela signifie qu’il conviendra, en respectant cependant des phases de transition, de basculer une part significative des soutiens directs découplés, d’une part, vers des instruments de gestion des risques et, d’autre part, vers la rémunération des services non marchands assurés par les exploitations.»
L'étude montre également qu'une telle orientation de la Pac suppose de maintenir des filets de sécurité, de plafonner le montant des aides directes par emploi agricole et de renforcer le pouvoir des organisations de producteurs (cadre juridique de la contractualisation entre producteurs et industriels, suivi du partage des marges dans les filières, etc.).
Ces réformes supposent que l'UE obtienne de ses partenaires à l’OMC la possibilité de maintenir une protection tarifaire aux frontières qui soit compatible avec le maintien, à un niveau acceptable, des productions considérées comme stratégiques au plan territorial. En contrepartie, l'UE devra vraisemblablement tirer un trait sur les restitutions et autoriser une protection spécifique des marchés agricoles des pays les plus pauvres.
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