L'ONG Générations Futures a annoncé ce mardi 23 avril 2013 le dépôt imminent d'une plainte pour « mise en danger de la vie d'autrui » contre des services du ministère de l'Agriculture qu'elle accuse d'avoir laissé sur le marché sept produits phytosanitaires jugés toxiques contre l'avis de l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses).
Ces cinq désherbants, dont certains sont vendus aux particuliers, et deux insecticides « sont actuellement sur le marché alors qu'un avis défavorable a été rendu par l'Anses, révélant notamment des risques inacceptables pour l'applicateur ou le consommateur », écrit l'ONG dans la plainte qui doit être déposée dans la semaine auprès du procureur de la République.
La plainte vise « les fabricants des produits phytosanitaires et les représentants de l'Etat chargés des autorisations de mise sur le marché desdits produits ».
Plus globalement, Générations Futures appelle au retrait du marché de dizaines de pesticides pour lesquels l'Anses a émis des avis défavorables – en raison de l'impact sur la santé ou l'environnement – ou recommandé des restrictions d'usage et dont la Direction générale de l'alimentation (DGAL), dépendant du ministère de l'Agriculture et autorisant les mises sur le marché, n'a pas tenu compte.
« C'est inacceptable », a déclaré le président de l'ONG, François Veillerette, lors d'une conférence de presse à Paris. Même si les positions de l'Anses sont consultatives, l'Agence sanitaire « ne donne pas un avis sur sa mauvaise ou bonne humeur. C'est un avis scientifique par rapport à la règlementation européenne », a-t-il insisté.
L'ONG base sa plainte sur deux lettres, dont l'une est datée du 27 août 2012, du directeur de l'Anses Marc Mortureux au directeur de la DGAL Patrick Dehaumont. Dans ce courrier, M. Mortureux revient sur des remarques déjà formulées dans une lettre en 2009 et « attire l'attention » sur « le maintien sur le marché des produits pour lesquels l'Agence avait émis un avis défavorable ou un avis favorable avec restrictions ».
Le président de l'Anses y a joint, en annexe, une liste d'une quarantaine de pesticides problématiques. Générations Futures a vérifié s'ils étaient toujours sur le marché. Depuis l'envoi de la lettre, « il y a eu quelques modifications, mais très peu », a souligné François Veillerette.
Dans un communiqué diffusé mardi soir, Stéphane Le Foll, ministre de l'Agriculture, a réagi à l'accusation portée contre la DGAL.
« Il tient à rappeler que la DGAL et l'Anses collaborent en permanence tant au niveau des équipes que des directions, en particulier sur la question des AMM (1), indique le communiqué. Pour mémoire, la mise sur le marché d'un produit phytosanitaire en France est conditionnée à l'autorisation au niveau européen des substances le composant ainsi qu'à son évaluation par l'Anses et à une consultation interministérielle concernant les ministères de la Consommation, de la Santé, de l'Environnement et du Travail ».
Les cas faisant l'objet des échanges entre la DGAL et l'Anses « relèvent de situations très diverses, notamment :
- des cas où l'absence de décision de la part de l'Administration vaut rejet de la demande d'AMM ;
- d'autres nécessitant une expertise complète sur la base de l'avis de l'Anses et une procédure contradictoire, avant de confirmer l'AMM ou de décider de son retrait ;
- d'autres pour lesquels l'Anses émet des réserves sur l'efficacité d'un produit, sans signaler de risques sanitaire ou environnemental, ce qui n'entraîne pas nécessairement le retrait de l'AMM ».
Le ministre « demande à la DGAL de répondre point par point à toutes les questions posées par Générations Futures, et de rendre ces informations publiques au début de la semaine prochaine, car dans ce dossier comme sur tous les sujets sanitaires, la transparence est de mise ».
Cette situation a par ailleurs révélé des retards de mise à jour de la base de données publique sur les AMM. Le ministre demande, en conséquence, « un audit pour identifier les blocages et proposer des solutions garantissant une plus grande réactivité dans la mise à jour de cette base de données, et toute la clarté dans les décisions qui sont prises ».
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(1) AMM : autorisation de mise sur le marché.