La pauvreté touche de plus en plus de Français et fait peur aux enfants, révèlent deux sondages rendus publics mardi par le Secours populaire.
Selon le neuvième baromètre annuel Ipsos sur la perception de la pauvreté par les Français, une majorité (57 %) déclarent avoir été, à un moment de leur vie, sur le point de connaître la pauvreté (+2 points par rapport à 2014). Un chiffre qui a « extrêmement augmenté », de 10 points en 10 ans, a expliqué Etienne Mercier, directeur du département opinion d'Ipsos, lors d'une conférence de presse.
Parmi ceux en passe de connaître une situation de pauvreté, 35 % disent l'avoir effectivement vécue en 2015 (identique à 2014), précise le sondage mené auprès de 1.013 personnes de 15 ans et plus interrogées par téléphone du 20 au 22 juin. Un chiffre qui augmente pour les femmes (38 %), les non-diplômés (45 %) ou les revenus de moins de 1.250 euros mensuels (64 %).
Pour les Français, être pauvre commence à moins de 1.054 euros mensuels, non loin du Smic (1.135 euros). Et 66 % disent connaitre une personne proche (famille ou amis) qui vit cette pauvreté. Selon la Darès (ministère du Travail), le seuil de pauvreté s'établissait à 987 euros par mois en 2012 (dernière donnée disponible).
Autre indicateur inquiétant, 87 % des personnes interrogées jugent que les risques que leurs enfants connaissent un jour la pauvreté sont plus élevés que pour leur propre génération (85 % en 2014). « Une inquiétude record », selon M. Mercier, à mettre en parallèle avec la propre peur des enfants.
Selon un autre sondage, portant sur 505 enfants de 8 à 14 ans, près de six enfants sur dix craignent de devenir pauvres un jour. Selon ce deuxième sondage Ipsos, réalisé du 15 au 21 juin par internet, la crainte augmente avec l'âge : 63 % chez les 11-14 ans, 52 % chez les 8-10 ans. Si 5 % disent avoir l'impression d'être déjà pauvres, la proportion monte à 13 % pour les enfants de familles monoparentales, et à 19 % chez ceux dont les parents gagnent moins de 1.250 euros par mois.
« Emouvant et tragique »
Selon ce sondage, une large majorité (66 %) pense également qu'il leur sera « difficile » de trouver un emploi plus tard. Une crainte qui s'accroît avec l'âge : 58 % chez les 8-10 ans, 71 % chez les 11-14 ans. Et si 71 % pensent qu'avoir de bonnes notes à l'école peut leur permettre de trouver un emploi, les plus âgés sont plus pessimistes (66 % des 11-14 ans, alors que les 8-10 ans y croient à 77 %).
Les enfants estiment à 88 % qu'il y a « beaucoup » de pauvreté dans le monde, mais sont conscients qu'il y en a aussi en France (« beaucoup » pour 48 %, « un peu » pour 50 %). Ils ont d'ailleurs le sentiment de côtoyer des pauvres dans leur entourage, à l'école (61 %), dans leur quartier (52 %) ou leur famille (39 %).
Principales conséquences de la pauvreté : 40 % des adultes disent peiner à payer certains actes médicaux mal remboursés, 34 % à payer leurs dépenses d'électricité et chauffage, 33 % à payer leur loyer ou leur emprunt immobilier, et 29 % à se procurer une alimentation saine et équilibrée. Les parents disent à 50 % avoir également des difficultés à envoyer leurs enfants en vacances au moins une fois par an, 49 % à leur payer des activités (musique, sport, ciné, théâtre, etc.) et 27 % à leur payer la cantine.
Ce sont « des chiffres émouvants et tragiques », a souligné le président du Secours populaire, Julien Lauprêtre, lors de la conférence de presse de lancement de la campagne « pauvreté-précarité 2015 », qui sera en partie mobilisée « en direction des migrants et réfugiés ».
Le parrain de la campagne de 2015, l'acteur Gérard Klein, ancien interprète de la série « l'Instit », a appelé « à envoyer de l'argent au Secours populaire ». L'association, qui a fêté cette année ses 70 ans, a accueilli et aidé 2.737.300 personnes en France en 2014.