La Chine, premier pays consommateur de soja dans le monde, ne cesse de gonfler ses importations de cet oléagineux, nécessaire aux éleveurs pour répondre à la consommation croissante de viande et de poisson des Chinois.
Quand la Chine a commencé, il y a une trentaine d'années, à s'ouvrir au monde, la plupart des familles avaient rarement l'occasion d'inclure la viande dans leurs menus quotidiens. Mais trois décennies d'un essor économique insolent ont profondément fait varier leur régime alimentaire.
Désormais, environ 80 % de la demande chinoise de soja - évaluée à quelque 70 millions de tonnes (Mt) en 2012 - est ainsi transformée en aliments destinés à nourrir les animaux d'élevages, selon les analystes. Seulement 20 % arrive dans les assiettes des Chinois sous forme de tofu (fromage de soja fermenté), de lait de soja ou de sauces d'assaisonnement.
La fabrication de tourteaux de soja, à forte teneur en protéines et très utilisés pour nourrir bovins, porcs et volailles, « représente le principal débouché (pour le soja) », observe Zhang Lanlan, analyste de Sublime China Information, société spécialisée dans les matières premières, interrogé par l'AFP. « La demande pour les aliments d'élevage reste en pleine expansion, étant donné l'urbanisation » et l'élévation du niveau de vie dans le pays, qui amènent les Chinois à accroître leur consommation de viande, ajoute-t-il.
Alors que Pékin s'est longtemps inquiété de la capacité du pays à maintenir son autosuffisance alimentaire, la Chine dépend en revanche lourdement de ses importations de soja, à hauteur des trois quarts de sa consommation.
Les agriculteurs chinois ont produit en 2012 environ 12,8 Mt de soja, tendant à privilégier des cultures plus rentables, tandis que les importations de soja du pays ont atteint 58,38 Mt l'an dernier, un bond de 11,2 % par rapport à 2011, selon des statistiques officielles.
Selon le cabinet de conseil Beijing Orient Agribusiness, les Etats-Unis étaient en 2012 le premier fournisseur de soja de la Chine, couvrant 44 % des importations du pays, devant le Brésil (41 %) et l'Argentine (10 %). Et d'après les prévisions du ministère américain de l'Agriculture (USDA), la Chine devrait avoir importé cette année de 63 à 67,5 Mt de soja, de nouveau en forte hausse tandis que la production locale pour 2013 devrait être restée stable, à 12 Mt.
Des OGM importés massivement, mais pas cultivés dans le pays
Plus de 90 % du soja cultivé aux Etats-Unis est génétiquement modifié. Alors que Pékin interdit aux producteurs chinois, principalement concentrés dans le nord du pays, d'avoir recours à des cultures transgéniques, la Chine autorise l'importation de 11 variétés de soja OGM - les trois dernières ayant été approuvées en juin.
En dépit des inquiétudes très vives des consommateurs chinois en termes de sécurité alimentaire, suite à une pléthore de scandales sanitaires dans le pays, l'importation de soja transgénique fait à peine débat. « Les variétés génétiquement modifiées que la Chine importe sont propres à la consommation. (...) Les gens ne doivent pas s'alarmer », a cependant réaffirmé récemment le Quotidien du peuple, organe du Parti communiste chinois.
Et même si la deuxième économie mondiale a vu sa croissance ralentir sensiblement, enregistrant en 2012 sa plus faible performance depuis 13 ans, son appétit pour le soja ne devrait pas faiblir, estiment les experts. « Quand l'économie bat de l'aile, la demande pour les produits agricoles connaît assurément des restrictions, mais ce n'est pas évident » quand on regarde les statistiques, a souligné Gao Yanbin, analyste du courtier Jinshi Futures. « L'environnement économique en Chine est morose, mais la consommation alimentaire continue au contraire de progresser », insiste-t-il.
La demande chinoise de soja a cependant quelque peu pâti cette année de l'épidémie de grippe aviaire H7N9 qui a drastiquement pesé sur la consommation de volaille et tué plus d'une quarantaine de personnes. Mais les élevages commencent à se rétablir et les achats de tourteaux de soja augmentent à nouveau, indiquent les experts, prévenant que la tendance devrait se poursuivre.
De fait, la Chine possède des capacités de trituration de soja atteignant plus de 100 Mt par an, ce qui offre encore une large marge à la progression irrésistible de la demande du pays.