A travers un rapport diffusé le 25 janvier 2012 sur les conditions de travail des travailleurs saisonniers marocains (des marocaines en l’occurrence) dans les plantations de fraises à Huelva (Espagne), la Fédération internationale des droits de l'homme (FIDH) dénonce « les entraves aux droits humains dans un système de migration circulaire » tel qu'il est pratiqué dans l'Union européenne.
Le rapport d’enquête de la FIDH intitulé « Main-d’œuvre importée pour fraises exportées » sur la situation des travailleurs saisonniers dans les plantations de fraises dans le sud de l’Espagne déplore que « les conditions économiques, de concurrence et de vente des produits, poussent les producteurs à réduire au maximum leurs frais et à utiliser la main-d’œuvre comme variable d’ajustement ». Avec au bout du compte des « atteintes aux droits des travailleurs qui se trouvent complètement dépendants de leur employeur », regrette la FIDH.
A Huelva, en Andalousie, la culture intensive de la fraise, destinée à être exportée de manière précoce vers les marchés européens, fait appel pendant quelques mois de l’année à une main-d’œuvre temporaire abondante (soit plus de 50.000 personnes), principalement constituée de travailleurs migrants, marocains, et généralement des femmes (mariées, avec des enfants en bas âge, critères « censés assurer un retour au pays et prévenir des tentatives de prolonger leur séjour sur le sol européen », précise la FIDH).
Cette situation est due à la politique du gouvernement espagnol, dénonce la FIDH, qui a mis en place « le système de la contratación en origen », un système qui vise à recruter « à la source », et « dans leur pays d’origine, des travailleurs qui sont alors convoyés puis répartis dans les plantations », avec comme condition sine qua non préalable à toute embauche « un engagement à retourner dans leur pays d’origine à la fin de la saison ».
« En multipliant les obstacles à l’immigration et en ne créant que de rares fenêtres d’opportunité de travail légal, la politique migratoire de l’Union européenne, et celle de l’Espagne en particulier, placent de fait les migrants et migrantes dans une situation de vulnérabilité face aux employeurs et aux intermédiaires, et porte atteinte au droit à une vie familiale normale, martèlent les défenseurs des droits de l'homme. Il s’agit là d’une des conséquences négatives intrinsèques du système de migration circulaire, modèle promu par l’Union européenne, afin de pourvoir aux besoins en main-d’œuvre, tout en garantissant la non-installation des migrants sur son sol. »
La FIDH demande aux autorités espagnoles de faciliter la possibilité pour les travailleurs saisonniers d’obtenir des cartes de séjour permanent et de faire venir leur famille, de réformer le droit du travail « et notamment la convention collective de Huelva afin de renforcer les protections octroyées aux travailleurs agricoles », d'intensifier les inspections du travail, et enfin de « ratifier la Convention sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille ».
Elle demande également aux entreprises de la grande distribution, de veiller au respect des droits de l’homme des travailleurs par leurs fournisseurs.
Enfin, elle appelle le Parlement européen à amender la proposition de « directive travailleurs saisonniers » afin d’augmenter le niveau de protection et l’accès aux droits, en renforçant l’égalité de traitement, la non-discrimination, les conditions de logement et de travail décentes et la protection sociale.
Elle souhaite que l'UE remette « au cœur de sa politique migratoire les principes de respect des droits humains, de non-discrimination et d’égalité de traitement ».
Téléchargez le rapport de la FIDH :