Après un an de débats à la suite de la communication de juin 2006, la Commission européenne a présenté mercredi sa proposition législative pour la réforme de l'organisation commune de marché (OCM) du vin. «Les principaux objectifs sont d'améliorer la compétitivité des viticulteurs de l'UE, de les aider à conquérir ou reconquérir des parts de marché», a affirmé le directeur général de la DG Agriculture de la Commission, Jean-Luc Demarty, venu présenter le projet de réforme à Paris.
«Cette réforme n'a pas pour objectif de faire des économies», a-t-il assuré, soulignant que le budget annuel de 1,3 milliard d'euros consacré à l'OCM vin serait maintenu jusqu'en 2013.
Bruxelles souhaite que l'argent soit dépensé différemment. Environ 800 millions d'euros sont actuellement consacrés chaque année à des mesures «négatives», notamment pour distiller le vin excédentaire sur le marché communautaire. «Nous voulons supprimer ces mesures et orienter l'OCM vers des mesures positives», par exemple la promotion sur les marchés des pays tiers, a expliqué Jean-Luc Demarty.
Une partie du budget de l'OCM sera alloué à des mesures de développement rural destinées aux régions viticoles (de 100 millions d'euros prévus en 2009 à 400 millions d'euros en 2014) et une autre partie sera répartie en enveloppes nationales (623 millions d'euros en 2009 à 830 millions d'euros à partir de 2015) qui permettront aux Etats membres d'adapter les mesures à leur situation particulière.
La part qui serait allouée à la France serait d'environ 25% selon la règle de répartition entre Etats membres. Celle-ci tiendra compte de l'utilisation historique du budget de l'OCM (21% pour la France) de la superficie du vignoble et de la production de chaque pays.
La Commission envisage que sa proposition soit discutée par le Conseil des ministres de l'Agriculture et adoptée d'ici à la fin de l'année pour une entrée en application lors de la campagne 2008-2009.
Concernant l'arrachage, Bruxelles confirme que son objectif est ramené à 200.000 ha sur 5 ans, contre 400.000 ha envisagés en juin 2006. «C'est une mesure nécessaire, mais secondaire et transitoire», a estimé le directeur général de la DG Agriculture. «L'objectif est d'assainir le marché et de permettre à ceux qui ne veulent pas continuer de sortir dans la dignité», a-t-il ajouté. L'arrachage pourra être couplé avec une mesure de préretraite.
La première année, la prime à l'arrachage sera supérieure de 30% aux niveaux actuels afin de stimuler dès le lancement l'intérêt pour cette mesure. Le montant de la prime sera ensuite dégressif tout au long des cinq années d’application du régime. Le budget passera de 430 millions d'euros la première année à 59 millions d'euros la cinquième année.
Il sera permis aux Etats membres de limiter l’arrachage des vignobles situés en zones de montagne ou de forte pente ainsi que dans les régions écologiquement sensibles et d’interrompre l’arrachage si la superficie totale cumulée des opérations atteint 10% de leur domaine viticole.
Les surfaces qui auront fait l’objet d’un arrachage donneront automatiquement droit au paiement découplé (DPU).
Parmi les mesures qui suscitent l'opposition des producteurs français, Bruxelles maintient sa proposition de suppression des droits de plantation à partir de 2014. «Une fois que le marché sera rétabli, il faut laisser ceux qui ont des marchés et qui veulent planter» le faire, a soutenu Jean-Luc Demarty.
La libéralisation des droits de plantation inquiète notamment les producteurs de vins AOC. Cette question sera certainement discutée par les ministres de l'Agriculture au cours des prochains mois.
Une des autres propositions de Bruxelles qui suscite un débat est l'interdiction de la chaptalisation. L'enrichissement des vins par des moûts concentrés rectifiés resterait par contre autorisée mais l'aide au môut disparaîtra.
Bruxelles propose de mettre l'accent sur la promotion des vins européens sur les marchés des pays tiers. Il s'agit d'aider les opérateurs à améliorer leur présence commerciale, par exemple aux Etats-Unis, au Japon ou chez les grands pays émergents comme l'Inde et la Chine afin de concurrencer davantage les vins du Nouveau Monde. 120 millions d'euros par an, répartis dans les enveloppes nationales, seront consacrés à cette mesure. Les marques européennes pourront en bénéficier pour faire la publicité, a indiqué Jean-Luc Demarty.
La proposition de réforme comporte également un volet consacré à la gestion des crises avec des mesures financées dans le cadre des enveloppes nationales. Il s'agit par exemple d'aider la vendange en vert ou de l'assurance récolte.
La Commission veut également réformer les règles de segmentation et d'étiquetage. La catégorie des vins avec indication géographique se subdivisera en deux sous-ensembles: les vins avec indication géographique protégée (IGP) et les vins avec appellation d’origine protégée (AOP).
Les étiquettes des vins de l’Union européenne dépourvus d’indication géographique pourront porter la mention du cépage et de l’année de récolte.