Les ministres européens de l'Agriculture, réunis lundi à Bruxelles, se sont bornés à lancer une réflexion à long terme sur la crise du secteur laitier, sans mesure d'aide immédiate, malgré une manifestation de plusieurs milliers de producteurs en colère.
A l'issue de la rencontre, la commissaire européenne à l'Agriculture, Mariann Fischer Boel, a annoncé qu'un «groupe d'experts de haut niveau» allait plancher à partir de mardi prochain, en vue de faire d'ici à la fin de juin 2010 des propositions sur des mesures de moyen et long terme à prendre en faveur du secteur.
Ce groupe réfléchira, entre autres, à la mise en place de «relations contractuelles» au niveau national entre producteurs laitiers et industriels, afin de limiter les effets «de la volatilité des prix», a proposé Mariann Fischer Boel.
Ce comité comprendra des membres de la Commission européenne et des Etats membres. Les experts discuteront des moyens de renforcer la transparence des marges dans la filière. Ils parleront également d'innovation et de «l'éventualité d'un marché à terme».
De nombreux Etats membres, menés par la France et l'Allemagne, ont aussi souhaité que le groupe étudie «un cadre régulé» du marché du lait, a précisé la commissaire européenne.
Mais elle n'a proposé aucune mesure de court terme, autre que celles déjà annoncées comme la possibilité pour les gouvernements de verser jusqu'à 15.000 euros par producteur.
«Au vu du budget pour 2010 (de la Pac), nous disposons de marges de manoeuvre extrêmement limitées», a affirmé Mariann Fischer Boel. Pour dégager des fonds nouveaux, «il faudrait soit demander aux Etats membres de payer plus», ce que les gouvernements auront du mal à accepter, soit réduire les subventions versées à tous les agriculteurs pour aider spécifiquement le secteur laitier, a-t-elle argumenté. «Je ne vois aucune de ces deux options fonctionner», a-t-elle dit.
Partisan d'une nouvelle régulation du secteur laitier, le ministre français de l'Agriculture, Bruno Le Maire, s'est félicité que le mandat du groupe d'experts corresponde «mot pour mot» aux propositions faites par la France et l'Allemagne.
«Nous avons un signal politique fort en faveur de la régulation européenne du marché du lait», s'est-il réjoui. Même si le terme cache de fortes divergences d'un pays à l'autre.
Avec la mise en place de ce groupe d'experts, «une dynamique se met en marche, mais j'aurais souhaité plus», a commenté pour sa part le ministre autrichien de l'Agriculture, Nikolaus Berlakovich. «Les producteurs laitiers attendent maintenant une aide concrète, et la Commission dit: ça va aller comme ça», a-t-il déploré.
De fait, Mariann Fischer Boel s'est contentée de souligner lors de la réunion que les mesures prises jusqu'ici commençaient à «avoir de l'effet» au vu de la récente remontée des prix.
Un constat que ne partagent pas les producteurs de lait. Quelque 2.400 d'entre eux, à bord de 740 tracteurs, selon la police, et jusqu'à 5.000 selon les organisateurs, ont laissé libre cours à leur colère tout au long de la journée devant le bâtiment où étaient réunis les ministres, en plein quartier européen de Bruxelles.
Les manifestants, faisant face à un important dispositif de policiers en tenue anti-émeute, ont lancé oeufs et bouteilles en direction du lieu de la réunion, des policiers, mais aussi parfois des journalistes. Les plus déterminés ont tenté de mettre le feu à des bottes de paille, entraînant l'intervention des canons à eau.
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