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Article 5 :

Maternité collective : une répartition des tâches

En s'associant dans une maternité collective, quatre engraisseurs ont sécurisé leur approvisionnement et embauché de la main-d'œuvre spécialisée.

Depuis vingt ans, il n'y a plus de truies sur l'exploitation de Michel Nauleau, à Poullignac, en Charente. Ayant abandonné le naissage pour des questions de main-d'œuvre, il s'est d'abord fourni en porcelets chez un confrère naisseur-engraisseur qui lui vendait juste de quoi remplir ses places d'engraissement.

Ce système a pris fin en 2002- 2003, lorsque le naisseur a cessé la vente de porcelets pour renforcer son propre atelier d'engraissement. « Lui ne pouvait plus me fournir et je voulais augmenter ma production de 1.200 à 1.600 places d'engraissement », explique-t-il.

Son groupement de producteurs connaissait d'autres éleveurs à la recherche de solutions : des naisseurs voulant arrêter les truies, des engraisseurs lassés des problèmes sanitaires dus à la multiprovenance de leurs porcelets. Le groupement les a donc mis en relation et leur a parlé d'un site à vendre en Vendée.

Ainsi est né le projet de maternité collective entre des éleveurs habitant à plus de 200 km les uns des autres et qui ne s'étaient jamais rencontrés auparavant.

« Le groupement de producteurs a réuni des personnes qui étaient motivées et dont les exploitations tournaient bien, souligne Michel Nauleau. Même si nous ne nous connaissions pas, nous pouvions nous faire confiance. Et nous avions tous été naisseurs à une époque, donc nous connaissions tous le métier. »

Ce qui les amène à raisonner comme des naisseurs-engraisseurs, et non comme des engraisseurs clients de la maternité : « C'est notre exploitation et ce sont nos truies. »

Michel Tuffereau, Florian Taupin, Jean-Claude et Gilbert Boisseau ainsi que Michel Nauleau se sont donc rencontrés, ont visité puis acheté le site. Ils ont rasé une grande partie des bâtiments pour bâtir du neuf, réaménagé le reste, et transformé cette ancienne exploitation naisseur-engraisseur de 250 truies en exploitation naisseur de 700 truies.

Les dimensions d'élevage étant équivalentes, la demande d'autorisation de la maternité collective a été assez simple. L'investissement total (bâtiments, travaux, cheptel, matériel) s'est élevé à 1,5 million d'euros. La maternité collective a pris la forme d'une SCEA, dont les parts sociales ont été réparties entre les associés au prorata du nombre de porcelets achetés.

« Chaque exploitation est liée à la SCEA par un contrat d'approvisionnement et à un certain nombre de porcelets à prendre régulièrement, indique l'exploitant. Et c'est une obligation : si un associé se trouve empêché de prendre ses porcelets, c'est à lui de trouver un débouché. »

Les porcelets en excédent (qui constituent la marge de sécurité) sont soit répartis entre les associés, soit vendus au groupement.

 

Intéresser les salariés

Une équipe de salariés a été recrutée pour travailler à l'élevage. Après un taux de rotation du personnel assez important les premières années, dû à la difficulté de trouver des salariés assez pointus techniquement et décidés à rester dans la région, la composition de l'équipe s'est stabilisée. Parce que la réussite technico-économique de l'élevage repose sur eux, les salariés perçoivent un intéressement sur la marge de l'entreprise, en fonction des résultats techniques obtenus.

Les associés habitant dans trois départements différents et à des distances de 100 à 250 km de la maternité, leurs salariés jouissent d'une grande autonomie. Ils savent aussi que personne ne viendra les aider s'il y a un problème. Sur place, c'est Hervé Huyghe, le chef d'élevage, qui gère les problèmes et fait l'interface entre la maternité et les dirigeants.

Ces derniers reçoivent un tableau de bord hebdomadaire avec les résultats techniques de la maternité, ainsi qu'un compte- rendu à chaque visite d'un vétérinaire. De l'ordre d'une fois par mois au début, les réunions se sont beaucoup espacées. Mais « nous sommes en permanence au courant de ce qui se passe dans l'élevage », apprécie Michel Nauleau.

Pour lui, le succès de ce système repose sur trois piliers : « une bonne confiance entre associés, une équipe de salariés bien gérée par un bon chef d'élevage et un compte-rendu permanent de ce qui se passe dans l'élevage ».

Les associés ont de quoi être satisfaits de cette solution. Les performances techniques sont bonnes, l'approvisionnement en porcelets sécurisé, les coûts de production maîtrisés et le temps de travail négligeable par rapport à ce qu'aurait requis le maintien du naissage sur leur exploitation.

Si les débuts ont été un peu laborieux (construction et mise en fonctionnement de la maternité, recrutement des salariés, etc.), à présent la gestion de la maternité collective à distance occupe quelques heures par semaine. « Si chacun avait un élevage de truies chez lui, il faudrait y être tous les jours et gérer les salariés au quotidien, souligne-t-il.

Et avec des ateliers de plus petite taille, nous n'aurions pas les moyens d'avoir des salariés aussi pointus techniquement. Tandis que là, chacun est très spécialisé, même s'ils restent interchangeables. » Et de conclure : « Dans la région, c'était très innovant de se regrouper entre producteurs aussi éloignés, ne se connaissant pas. Si nous n'avions pas mis en place cette solution, certains auraient sans doute abandonné le porc. »

 

 

Des porcelets à 40 euros tout compris

Avec plus de douze porcelets sevrés par truie, l'élevage se situe dans les très bonnes moyennes. Et les quatre associés s'y retrouvent économiquement. « Au départ, nous étions un peu plus chers que le prix de marché, mais aujourd'hui nous sommes au même niveau, car la raréfaction des porcelets a fait grimper les prix, analyse Michel Nauleau. Nous n'avons pas augmenté nos coûts depuis le début, ils ont même baissé en euros constants. Et, là, nous sommes encore en pleine charge de remboursement d'emprunts : à l'avenir, notre coût de production devrait diminuer. »

Le prix d'un porcelet à la sortie de la maternité  vacciné, tatoué et frappé au nom de l'élevage dans lequel il part , est de 40 €. Ce prix couvre les dépenses liées à la main-d'œuvre salariée (qui représente le poste principal), les achats d'aliment, les frais d'élevage et soins vétérinaires, le transport des porcelets chez les associés (selon un tarif unique quel que soit leur éloignement), l'épandage de lisier (chez des voisins, car la SCEA ne possède pas de terres) et l'ensemble des charges fixes.

« Tout est pris en compte dans notre coût de production, insiste Michel Nauleau. Alors qu'un élevage naisseur-engraisseur ne comptabilise pas toujours la main-d'œuvre familiale et les frais d'épandage, par exemple. »

 

 

Chacun gère son secteur d'activité 

Les premières années, les quatre associés se sont rencontrés fréquemment. Il fallait démarcher et mettre en concurrence les banques pour les emprunts, les entrepreneurs pour les travaux, etc.

Tous les quatre se sont réparti les tâches : l'un s'est occupé des fondations et du gros œuvre, l'autre des aménagements inté- rieurs, un troisième de la charpente et le dernier du suivi des travaux.

« Chacun avait la responsabilité d'un secteur, pointe Michel Nauleau. On se faisait mutuellement confiance pour mener les négociations chacun dans son secteur, les choix définitifs étant ensuite faits ensemble. »

Aujourd'hui, les rôles sont encore bien délimités. L'un des associés a endossé la fonction de gérant, chargé de la gestion financière. Un autre est chargé du suivi technique de l'élevage. Le troisième gère l'épandage et la facturation des porcelets.

Enfin, Michel Nauleau, cogérant, s'occupe des ressources humaines et des gros approvisionnements en céréales. « Chacun gère son secteur d'activité en tenant informés ses collègues lorsqu'il y a une évolution ou un problème. Et personne n'empiète sur le terrain de l'autre : si les salariés font part d'un problème à l'un de mes associés, celui-ci les renvoie vers moi. Et si l'on me fait remonter un problème technique, j'en informe le collègue chargé du suivi technique. La confiance est à la base de notre entente. Sinon, ce ne serait pas possible de gérer une société ensemble. »

 

Bérengère Lafeuille

(pubié le 4 mai 2012)

 



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