Près de 18.600 exploitations agricoles pourraient changer leur mode de production et opter pour la bio d'ici à 2015, selon le centre d'études et de prospective (CEP) du ministère de l'Agriculture (1), qui a décortiqué les réponses d'intention de conversion à l'agriculture biologique du recensement général agricole (RGA) de 2010, en les recoupant avec les données de l'Agence bio.
Si l'orientation technique, le type de production et la surface agricole utile (SAU) de ces exploitations restent inchangés, environ 745.000 ha supplémentaires seraient en conversion ou produiraient sous certification biologique à l'horizon de 2015, assure le CEP dans son analyse, publiée le 24 octobre 2012. Cela représenterait un doublement en cinq ans des surfaces bio, qui avoisineraient alors 1,5 million d'hectares en France.
Cette évolution, si les intentions de conversion se confirment, aboutirait alors à une part de 5,5 % de la SAU française consacrée à l'agriculture biologique à l'horizon de 2015. Les exploitations bio représenteraient plus de 7 % des exploitations agricoles françaises (à effectif global constant).
Les surfaces converties en bio d'ici à 2015 seraient surtout des prairies temporaires et des surfaces en grandes cultures, détaille l'analyse. Mais toutes les cultures gagneraient de nouvelles surfaces bio.
En élevage, 2,3 % du cheptel national pourraient s'ajouter d'ici à 2015 au cheptel déjà élevé en mode biologique. Mais les intentions de conversion varient fortement selon le type d'élevage, avec plus d'ovins et caprins, et de bovins concernés (déjà plus fortement représentés en bio).
L'étude des données du RGA de 2010 montre une « montée en puissance des régions du sud et de l'est de la France ». Les Régions Rhône-Alpes, Aquitaine, Midi-Pyrénées ou Languedoc-Roussillon resteront celles présentant les effectifs les plus importants en agriculture biologique.
Il faut noter que cette analyse ne prend pas en compte les installations en bio, ni les déconversions, plus difficiles à renseigner, précisent les auteurs de l'analyse. L'Irstea (ex-Cemagref) a bien démontré cependant que de 1 à 5 % des exploitations en mode biologique cessent chaque année de produire sous certification, sur la période 2005-2010, ou qu'à l'inverse, les exploitations agricoles peuvent faire l'objet d'une conversion à l'occasion de l'installation d'un jeune agriculteur.
« Au final, ces dynamiques d'entrée et de sortie restent suffisamment faibles pour ne pas remettre en cause, en ordre de grandeur, les projections présentées », expliquent les auteurs de l'analyse.
Cependant, l'innovation, l'accompagnement technique, l'organisation des marchés et la gestion des risques restent « des enjeux forts pour l'avenir de la filière », qui reste déficitaire pour certaines denrées issues de l'agriculture bio, remarque une deuxième note du CEP, également publiée le 24 octobre 2012 (2).
Pour les politiques publiques, la conversion vers l'agriculture bio – dont l'essor « significatif » aujourd'hui bénéficie d'un dispositif de soutien public « pérenne » ainsi que d'une « forte demande » – peut « constituer un modèle d'alternative et un laboratoire pour penser et mettre en œuvre des transitions vers des systèmes agricoles plus durables ».
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(1) Perspectives en agriculture biologique à l'horizon de 2015 – Note de veille du centre d'études et de prospective du ministère de l'Agriculture, n° 55 septembre 2012.
(2) Les enjeux de la production d'agriculture biologique en France – Note d'analyse du centre d'études et de prospective du ministère de l'Agriculture, n° 50 juillet 2012.