La planète Food est en place. Brésil, Turquie ou Corée du Sud ont pris leurs marques aux côtés des poids lourds européens ou américains pour conquérir les assiettes du monde au Salon international de l'alimentation (Sial), ouvert jusqu'à jeudi au nord de Paris.
Le Sial, qui affichait l'ambition de devenir à l'alimentaire ce que le « Mondial » est à la voiture, réunit pour ses cinquante ans 105 pays (contre 26 en 1964) et présente plus de 400.000 produits qui rempliront les rayons des supermarchés de demain. Vitrine de savoir-faire traditionnels et high-tech, de la gourmandise et des innovations, le salon est d'abord un lieu d'affaires : « Difficile d'avancer une estimation du chiffre d'affaires brassé pendant les cinq jours, mais à l'issue de la dernière édition en 2012, les exposants déclaraient avoir signé l'équivalent de six mois de carnets de commande », indiquait dimanche à l'AFP le président du Sial, Nicolas Trentesaux.
Selon lui, l'industrie accourt à Paris pour préparer l'avenir. « Le marché va exploser avec neuf milliards d'humains à nourrir dans 30 à 40 ans. Il faut se mettre en place maintenant », justifie-t-il. « Surtout avec l'explosion des classes moyennes en Asie et même en Afrique qui veulent toutes avoir accès à la diversification de leur alimentation. » Globalement, le Sial a progressé de 10 % en deux ans, en nombre d'exposants et en surface. « Les entreprises présentes ici sont les plus conquérantes, celles qui veulent exporter dans le monde entier », dit-il.
Après un coup de mou sur l'innovation dû à la crise en Europe, le climat est plus porteur cette fois, juge Xavier Terlet, le Monsieur innovation du salon, citant les 1.700 concepts nouveaux (70 % de plus qu'en 2012).
La Corée du Sud, présente pour la deuxième fois au Sial, est venue avec 28 entreprises ardentes de se faire connaître : « Comparé au Japon ou à la Chine, nos produits sont encore largement méconnus », explique Kim Yound Bum, directeur du Korea Agro-Fisheries Trade Organization. Sur le stand, de grandes jarres en terre cuite noire racontent le processus de fermentation – le Kimchi – inhérent à la gastronomie coréenne, mais de jeunes entreprises font aussi déguster chips d'algues, jus de céréales, huîtres fumées et marmelades d'aloe vera. Autant de produits qui affichent une ambition diététique sans gluten, ni gras, anti-oxydante.
Non loin, le Japon aussi se juge méconnu et juxtapose savoir-faire ancestraux, comme l'ail noir, fermenté à 60 degrés – une spécialité de Kyoto – ou nouilles de sarrasin et création, avec l'huile de poireau et le jus yuzu bio. Yuzuke Kuzuhara, directeur du Service agroalimentaire du Jetro (Japan External Trade Organization), relève la volonté exportatrice de son gouvernement : « Nous ne venons pas forcément signer des contrats ici, mais surtout pour nous faire mieux connaître. »
Retour de la France
Le Brésil, grand exportateur de café, sucre, soja, bœuf, poulet et jus de fruits, veut engranger un milliard de dollars de contrats sur le Sial. « L'Union européenne est un marché très important », explique Rafael Prado, gérant de marchés de l'Agence de promotion des exportations (Apex) du gouvernement brésilien. Apex-Brasil vient d'ailleurs d'annoncer un partenariat avec le distributeur français Casino qui s'engage à promouvoir 40 produits brésiliens dans ses magasins. Outre les produits bruts, le Brésil compte bien promouvoir sa culture alimentaire, ses pão de queijo (pains au fromage) ou ses baies d'açaï, fruit amazonien énergétique utilisé dans les jus et glaces. Tout comme la Nouvelle-Zélande, déjà premier exportateur mondial de produits laitiers et d'agneaux, qui vient faire déguster miels bio et huile d'avocat.
C'est aussi le retour de la France, premier exposant avec plus d'un millier d'entreprises (+10 %), souligne Nicolas Trentesaux : « Alors que sa présence déclinait d'année en année, elle renverse la tendance. » L'investissement repart dans le secteur en France, +2 à 3 % depuis le début de l'année », confirme Jean-Philippe Girard, président de l'Association des industries alimentaires françaises (Ania).
« Ce salon est le plus important du monde et il connaît une croissance de 10 % cette année ». Il apporte donc « un message de confiance pour l'ensemble des industriels et des agriculteurs », a déclaré le ministre français de l'Agriculture, Stéphane Le Foll, à son arrivée. « On a une marque, une image » à faire valoir à l'exportation, a-t-il insisté. Il compte bien le rappeler à ses homologues marocain, bulgare, tunisien, cambodgien et indien qu'il va rencontrer sur le salon.