Les Nations unies et d'autres organisations internationales ont appelé mardi à une action urgente pour combattre la flambée des prix alimentaires, créant un état-major de crise et réclamant un commerce mondial plus équitable.
Réunis à huis clos depuis lundi à Berne sous la direction du secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, les 27 représentants d'agences et organisations onusiennes ont reconnu l'urgence d'agir.
«Les prochaines semaines sont critiques. Pour deux milliards de personnes, les prix alimentaires élevés sont maintenant une question de combat quotidien, de sacrifice et même de survie», a averti Robert Zoellick, président de la Banque mondiale (BM).
Le secrétaire général de l'ONU a annoncé la création immédiate d'une cellule de crise rassemblant les chefs des agences onusiennes, du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale.
Cette cellule sera placée sous l'autorité directe de Ban Ki-moon , qui a chargé son secrétaire général adjoint, John Holmes, de sa coordination.
La priorité immédiate étant de «nourrir les affamés», le secrétaire général a réitéré l'appel aux pays donateurs de répondre «d'urgence et de manière complète» aux appels de fonds qui ont été lancés.
«Nos besoins totaux pour 2008 sont de 3,1 milliards de dollars. Il nous faut 755 millions de dollars de plus à cause de l'envolée des prix alimentaires», a rappelé Josette Sheeran, directrice exécutive du Programme alimentaire mondial (PAM).
«Nous ne disposons actuellement que de 18 millions de dollars en liquide», s'est-elle alarmée.
L'Organisation des Nations unies pour l'agriculture et l'alimentation (FAO) demande, quant à elle, 1,7 milliard de dollars pour renforcer la production agricole des pays touchés par la crise, alors que les stocks alimentaires mondiaux sont au plus bas depuis 1980.
«Nous avions tiré le signal d'alarme, mais personne n'a pris de décision au moment approprié», a dénoncé son directeur général, Jacques Diouf. «Il faut cesser de parler et passer à l'action.»
Le prochain rendez-vous est prévu à Rome entre le 3 et le 5 juin 2008, lors de la conférence de haut niveau sur la sécurité alimentaire, Ban Ki-moon appelant «les dirigeants du monde» à y participer.
Les organisations internationales ont par ailleurs appelé les Etats à ne pas recourir à des restrictions aux exportations pour défendre leur sécurité alimentaire.
«Ces contrôles encouragent l'accumulation, poussent les prix à la hausse et pénalisent les plus pauvres habitants de la planète», a souligné Robert Zoellick.
Même son de cloche du directeur général de l'OMC, Pascal Lamy: estimant qu'il est «évident que de telles mesures entraînent une hausse supplémentaire des prix», il a déclaré qu'«à court terme, ce n'est pas une bonne solution économique».
Le secrétaire général de l'ONU s'est joint à ces critiques en rappelant avoir demandé à tous les Etats de lever immédiatement ces mesures.
Pour faire face à la pénurie alimentaire et à la flambée des prix des denrées, l'Argentine, le Brésil, le Vietnam, le Cambodge, l'Indonésie, le Kazakhstan, l'Inde, l'Egypte, la Russie et la Chine ont imposé récemment des limitations à l'exportation de certains produits.
Selon Pascal Lamy, les négociations du cycle de Doha sur la libéralisation des échanges en cours à l'OMC sont la meilleure solution pour faire face à la crise.
«Les subventions des pays riches ont porté atteinte à la production alimentaire des pays en développement», a-t-il relevé. «Après six ans de négociations, ce qui est sur la table est une réduction majeure de 75% des subventions, assortie de l'élimination des subventions à l'exportation.» La conclusion du cycle «est faisable, nous y sommes presque parvenus», a-t-il assuré.