Les syndicats agricoles français et européens ont précisé mardi leur position à propos de l'annonce de la commissaire européenne à l'Agriculture, Mariann Fischer Boel, à l'issue de la réunion des ministres de l'Agriculture lundi, de rallonger l'aide au secteur laitier de 280 millions d'euros (M€).
Pour la FNSEA, «c'est trop peu au regard de la détresse paysanne et c'est bien tard au regard de cette crise qui dure depuis trop longtemps», selon un communiqué diffusé mardi.
«Cela ne résout en rien les problèmes profonds qui se posent au secteur laitier», indique la FNSEA, martelant que «des milliers d'exploitations en difficulté ont besoin de court terme, c'est-à-dire d'oxygène pour leur trésorerie», ainsi que «de moyen terme, c'est-à-dire de prix par une meilleure adéquation entre l'offre et la demande».
Le syndicat majoritaire considère que le secteur laitier, ainsi que toutes les autres productions, ont besoin «d'un vrai pilotage des marchés», car «en France, ce sont quasi toutes les productions qui sont en crise».
Pour Jeunes Agriculteurs (JA), on pourrait «rire» de ces 280 M€ «si la crise n'était pas aussi grave», considérant que les «450 € par exploitant laitier» que cela représenterait est «une somme bien insuffisante au regard des besoins des agriculteurs».
«Nous attendons de l'Europe une ligne politique forte en faveur de la régulation des marchés. Pour l'instant, l'Europe nous répond avec des aides insuffisantes qui arriveront trop tard», a également expliqué William Villeneuve, président de JA.
La Confédération paysanne a également estimé que le montant des aides ne serait pas en mesure d'améliorer la situation des éleveurs européens. «C'est une supercherie», a affirmé Philippe Collin, son porte-parole.
Mardi dans un communiqué, le syndicat souligne «le mépris avec lequel la Commission européenne et les ministres de l’Agriculture considèrent les producteurs de lait».
Ce que veulent les paysans, dit la Confédération paysanne, «c’est une politique laitière fondée sur la maîtrise des volumes mis en production» et non pas «un semblant d’assistanat». Selon elle, seule cette politique «permettra l’établissement durable du prix rémunérateur et du revenu», à un «moindre coût pour le contribuable».
Le syndicat souhaite que la Commission européenne et les ministres de l’Agriculture orientent leur travail vers «l’amélioration de l’"outil quotas", sur la maîtrise et la répartition des volumes de production».
Les producteurs laitiers de l’ European Milk Board (EMB), syndicat européen auquel adhèrent la Coordination rurale, à travers l'OPL (Organisation des producteurs de lait), ainsi que l'Apli (Association des producteurs de lait indépendants), se félicitent que le Conseil européen des ministres de l’Agriculture «a pour la première fois fait un pas concret en (leur) direction».
Selon Romuald Schaber, président de l’EMB, le président du Conseil européen a annoncé à l'issue de la réunion des ministres de l'Agriculture que «tout devait être fait pour équilibrer le marché».
L'EMB souligne «avant tout deux des mesures qui ont été annoncées à la sortie de la réunion du Conseil européen de l’Agriculture».
«Il est prévu d’élaborer en détail» d’ici au prochain conseil des ministres de l'Agriculture, le 19 novembre 2009, «des propositions concrètes portant sur le gel volontaire de quotas par rachat de volumes partiels et d’exploitations entières. Ces droits de livraison seraient alors annulés», indique le communiqué de l'EMB.
«Cela permettrait enfin de retirer efficacement du marché les excédents de lait», explique Ernst Halbmayr, de la fédération autrichienne IG-Milch. «Toutefois, le recours à ces mesures se ferait dans les pays sur une base volontaire. L’EMB demande expressément à tous les pays d’avoir recours à cette possibilité afin d’assumer leur responsabilité pour les producteurs laitiers.»
L'EMB se réjouit que «le groupe d’experts de haut rang qui réunit des représentants de gouvernement de tous les Etats européens» ait étudié des solutions pour la filière laitière «englobant également un cadre de régulation».
«Cette volonté de réfléchir à des règles du marché est nouvelle», déclare Pascal Massol, président de l'Apli.
«Nous convoquerons dans les deux semaines à venir notre propre groupe d’experts de haut rang qui traitera des problèmes de la filière laitière en impliquant des groupes de la société civile tels que des organisations de défense des consommateurs, le monde scientifique, des organisations non gouvernementales et la classe politique», indique Sieta van Keimpema, vice-présidente de l’EMB dans le communiqué.
«Il s’agit de trouver une réponse commune aux problèmes de la politique laitière actuelle et de préparer la mise en place d’une instance de contrôle. Au sein de cette instance, les producteurs laitiers se chargent de faire identifier le besoin de lait en Europe en impliquant les laiteries et les politiques. La production laitière s’orientera vers ce besoin en appliquant une régulation souple des quotas», explique-t-elle.
«Comme autre mesure, déclare R. Schaber, nous commencerons à regrouper le lait en Europe au-delà des frontières. Cela nous permettra d’exercer plus de poids devant les laiteries et la classe politique. Le lait est en nos mains. Ainsi pourrons-nous à l’avenir codécider du prix qui nous permette d’assurer un développement durable de la production laitière.»
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