A l'échelle mondiale, l'élevage émettrait plus de gaz à effet de serre que le secteur des transports. C'est pour combattre des idées reçues telles que celle-ci, en convoquant la science, que le CIV Viande, sciences et société se pose en médiateur scientifique entre les filières des viandes (ruminants essentiellement) et la société. En ce qui concerne les gaz à effet de serre, des éclaircissements s'imposent, a estimé le CIV lors d'une conférerence de presse mercredi.
« Dans un rapport de 2013, la FAO imputait 14,5 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre à l'élevage et ses filières. Son mode de calcul inclut les émissions indirectes dues à la fabrication des aliments animaux et des intrants pour les surfaces, mais aussi tout l'aval de la filière, jusqu'à l'emballage et la distribution », a expliqué Thomas Turini, chargé de projet en environnement pour le CIV, qui a épluché la littérature scientifique internationale durant une année entière avant d'en livrer une synthèse et une analyse. « De son côté, le Giec a chiffré en 2014 le poids du secteur des transports à 14 % des émissions mondiales. Mais le Giec a une approche sectorielle : il ne calcule que les émissions liées à l'utilisation des transports, pas celles liées à la fabrication des véhicules par exemple... »
Un raccourci simpliste
Nous voilà donc face à un raccourci simpliste, comparant deux chiffres issus de deux évaluations différentes, ne s'attachant pas aux mêmes impacts ! Selon Thomas Turini, il serait donc plus juste de dire : « La fourniture de lait, viande et œufs à la population mondiale émet plus que la seule utilisation des transports. » Et encore : vu les marges d'incertitudes, entre 14 et 14,5 %, on ne peut considérer l'écart comme significatif.
Si l'on décide de ne s'intéresser qu'à l'étape de production (en excluant l'amont et l'aval), l'agriculture ne contribue plus qu'à hauteur de 11 % des émissions mondiales de GES, dont les deux tiers issus de l'élevage (soit 7 % des émissions mondiales). En considérant que les émissions liées au pâtrurage et à l'épandage sont liées aux sols cultivés, et donc en les affectant au sous-secteur des cultures, la part de l'élevage tombe même à 5 % des émissions mondiales...
Le CIV ne nie pour autant pas l'impact de l'élevage sur le climat, notamment parce qu'il émet 29 % du méthane d'origine anthropique et un quart du N2O, qui ont un pouvoir réchauffant largement supérieur au CO2. Mais il ne faut pas négliger l'absoprtion de CO2 par les prairies : « avec 2,8 teq-CO2/ha/an stocké dans les prairies, celles-ci compensent entre 28 et 37 % des émissions nationales dues à l'élevage », souligne Thomas Turini. Selon le scpécialiste de l'Inra, Jean-François Soussana, la neutralité en carbone serait atteinte (autant d'équivalent carbone stocké par les prairies que d'équivalent carbone émis par les ruminants) avec un chargement à 1,2 UGB/ha. Attention toutefois au déstockage, qui se produit notamment lors du retournement des prairies : « Le déstockage va deux fois plus vite que le stockage de carbone », alerte Thomas Turini.