Marc Mortureux, directeur général de l'Anses (1), a détaillé, le 19 juin 2014 à Javené (Ille-et-Vilaine), les trois axes majeurs de travail de l'Agence nationale du médicament vétérinaire (ANMV) qui fête ses vingt ans. La lutte contre le développement de résistances aux antibiotiques figure en tête de liste, suivie par la surveillance des médicaments vétérinaires après leur autorisation de mise sur le marché (AMM) et, enfin, l'adaptation d'innovations thérapeutiques du secteur humain au monde animal.
La résistance des bactéries aux antibiotiques, et les risques qu'elle représente pour la santé publique, s'est taillée une place de choix lors de la table ronde organisée pour l'occasion. « 110 pays sur les 180 qui adhèrent à l'OIE (2) ont une législation qui ne permet aucun contrôle sur l'introduction et l'utilisation des médicaments vétérinaires, insiste Bernard Vallat, le directeur de l'OIE. La circulation et utilisation des antibiotiques chez l'animal doit être supervisée. Et la solution, c'est le vétérinaire. »
Christophe Brard, président de la SNGTV, rappelle que les praticiens sont engagés depuis des années dans la lutte contre l'antibiorésistance. « Nous avons élaboré des recommandations de bonnes pratiques de l'antibiothérapie par maladie et par espèce. Ces fiches seront bientôt diffusées et sont évolutives. Nous participons aussi à l'élaboration d'un guide de bonnes pratiques de l'antibiothérapie. L'objectif de réduire de 25 % la consommation d'antibiotiques en France nous semble réaliste. Cela fait des années que cette consommation baisse sans mesures coercitives », souligne-t-il avant d'évoquer la mise en place d'un système de suivi des prescriptions.
« La prise de conscience date de 25 ou 30 ans » (FNSEA)
De son côté, Joël Limouzin, vice-président de la FNSEA, veut tordre le cou à une rumeur. Celle selon laquelle « les agriculteurs utilisent de façon inconsidérée des antibiotiques. La prise de conscience du risque date d'il y a 25 ou 30 ans. Tous les acteurs se sont mobilisés pour avoir un sanitaire au top aujourd'hui. Les procès d'intention qui consistent à dire que les agriculteurs empoisonnent le consommateur sont insupportables. Les chiffres parlent pourtant d'eux-mêmes. La consommation d'antibiotiques en médecine vétérinaire a diminué et cela continue. »
Le vice-président de la FNSEA insiste également sur la prévention, et notamment l'utilisation des vaccins. Une position qui retient l'attention des laboratoires pharmaceutiques. « Avec les nouvelles technologies, nous allons pouvoir affronter de nouvelles pathologies, promet Jacques Bonin, le directeur de France Merial, au sujet des vaccins. Et arriver à réduire leur coût par rapport à l'antibiothérapie. Mais attention, le médicament vétérinaire ne doit pas devenir un produit de commodité qu'on achèterait comme une rame de papier. Et nous n'en sommes pas très loin ! »
Du côté de l'Administration, Patrick Dehaumont, le directeur général de la DGAL, insiste pour « que les connaissances sur l'antibiorésistance nous conduisent à prendre de nouvelles mesures. Nous avons un problème de santé publique, humaine et animale, et nous devons nous engager. Il y aura des mesures dans la loi d'avenir agricole qui porteront sur l'antibiorésistance. C'est pour cela que nous proposons de protéger les antibiotiques critiques. Et que nous insistons sur la prévention. Et que nous poussons pour éliminer l'usage préventif des antibiotiques en élevage pour le limiter au curatif. »
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(1) Anses : Agence nationale de sécurité sanitaire (à télécharger : le rapport d'activité de 2013 de l'Anses, mis en ligne le 18 juin 2014).
(2) OIE : Organisation mondiale de la santé animale.