La première adventice résistant au glyphosate a été identifiée en 2000. Aujourd'hui, elles sont au moins dix. Une commission, réunie par le National Research Council (NRC) pour évaluer l'impact des OGM sur la durabilité des exploitations agricoles, traite le sujet sans complaisance.
« L'usage massif de cultures tolérantes au Roundup, année après année, sans autre méthode de lutte, sur de vastes surfaces, est la cause du développement actuel de la résistance au glyphosate à une vitesse croissante, lâche David Ervin (Portland State University), président de ladite commission. C'est un sujet d'inquiétude majeur, car le phénomène, s'il continue, va éroder les avantages économiques et environnementaux de ces OGM, en obligeant vraisemblablement à recourir à des herbicides plus toxiques et davantage de labour. »
Comment cette résistance a-t-elle émergé ? « Soit ces adventices n'ont jamais répondu aux herbicides, mais étaient en minorité avant que les pratiques des agriculteurs ne leur offrent une opportunité écologique, suggère Micheal Owen (Iowa State University), soit cette résistance est le fruit de l'évolution. »
Le taux d'adoption des OGM continue de croître, mais certains facteurs pourraient affecter leur acceptation : la progression des adventices résistantes, l'évolution de la flore et l'accès à des variétés non OGM à haut rendement. Pour contrer la résistance, les scientifiques sont unanimes. Alternance des herbicides, rotation des cultures, labour…
« L'essentiel est de diversifier les stratégies de lutte et de réduire la dépendance au glyphosate », résume Lareesa Wolfenbarger (University of Nebraska). Mais, bien que ces alternatives existent, il y a trop peu d'incitation à agir individuellement pour un bénéfice public. La commission du NRC recommande la création d'un groupe de travail et de nouvelles études scientifiques.
« Il y a eu très peu de recherches sur les impacts sociaux, regrette Raymond Jussaume (Washington State University). Et il reste de grandes lacunes dans le domaine environnemental, malgré les études réalisées. » L'impact sur la qualité des eaux, entre autres, est méconnu.
Et si, demain, de nouveaux pays ouvraient leurs portes aux OGM Roundup Ready ? « Je m'inquiéterais de l'introduction de ces caractères dans des espèces cultivées ayant des cousines sauvages, mais pas pour le maïs ou le soja, souligne Micheal Owen. L'Europe a un long passé d'adventices résistantes aux herbicides. Les causes sont toujours les mêmes : les stratégies d'utilisation d'herbicides. Ainsi, si cette technologie était adoptée, je recommanderais fortement la mise en place préventive de plans de lutte alternative pour gérer l'évolution des résistances et assurer un meilleur retour économique. »
Les bénéfices des OGM priment-ils sur les inconvénients ?
David Ervin (Portland State University). Les OGM ont apporté jusque-là des avantages économiques et environnementaux substantiels aux farmers américains. Toutefois, ces bénéfices ne sont pas universels. Il y a une variabilité considérable entre exploitations et entre régions, due à la diversité des écosystèmes, à la pression des adventices, aux conditions économiques et au contexte social. Raymond Jussaume (Washington State University). Le manque de connaissances actuel ne permet pas de répondre. Lareesa Wolfenbarger (University of Nebraska). La technologie Roundup Ready facilite les pratiques de conservation du sol, spécialement le non-labour. Le recours aux OGM peut simplifier la conduite des cultures à court terme, mais la dépendance à cette technologie a conduit à la propagation d'espèces résistantes au glyphosate. |