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Les délais de livraison s'allongent

Publié le jeudi 24 janvier 2008 - 18h08

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«Il n'y en aura pas pour tout le monde, alors faites vos stocks dès maintenant.» Dès le mois d'octobre 2007, Michel Tramier, directeur général de Kverneland France, adressait un message clair à ses concessionnaires lors du Rau-Vicon Tour. Quatre mois plus tard, force est de constater que les délais de livraison s'allongent pour tous les matériels, en particulier les plus perfectionnés comme les tracteurs et les pulvérisateurs.

Un agriculteur doit aujourd'hui patienter entre trois et six mois pour recevoir les clés de son nouveau tracteur et l'attente peut atteindre neuf mois pour un pulvérisateur. L'importance du retard est variable selon les marques et les matériels mais le phénomène touche tout le monde. «Les délais s'allongent fortement par rapport aux saisons précédentes, constate Samuel Chanu, d'Agram. Selon les produits, nous pouvons livrer immédiatement ou dans six mois.»

Sur certains matériels très spécifiques comme les presses à gros canal, le retard est tellement important que plusieurs concessionnaires, conscients de ne pas pouvoir livrer avant la récolte, ont remboursé leurs clients entrepreneurs.

La cause de ces délais se trouve tout d'abord dans l'explosion de la demande. En France, les immatriculations de tracteurs neufs ont progressé de 7% en un an, tandis que les ventes de moissonneuses-batteuses ont augmenté de 6,4%. Même les ventes d'outils de travail de sol, après une dizaine d'années de baisse, ont flambé en 2007.

A quelques exceptions près, les carnets de commande s'affolent aussi dans le reste de l'Europe occidentale et dans les pays de l'Est.

De leur côté, les sites de production ont subi des opérations de rationalisation, ces dix dernières années, et sont maintenant organisés pour ne construire les appareils sophistiqués qu'une fois le bon de commande signé. «Dès que l'on commande un niveau d'équipement qui sort un peu du standard, les délais explosent», constate ce concessionnaire d'une grande marque.

Par ailleurs, beaucoup de constructeurs pointent du doigt leurs fournisseurs de composants, pris de court par l'explosion de la demande mondiale et la raréfaction des matières premières.

A l'usine Massey-Ferguson de Beauvais, certains composants en rupture de stock sont installés une fois le tracteur sorti de chaîne.

Chez Claas, dans l'autre usine française de tracteurs, au Mans, les dirigeants ont pris la décision d'arrêter la chaîne pendant plusieurs semaines, à la fin de 2007, pour effectuer des travaux et en augmenter la capacité. Ces adaptations permettent de maintenir des délais acceptables.

Beaucoup de concessionnaires français insistent aussi sur la concurrence des distributeurs des pays de l'Est, qui seraient devenus prioritaires pour certains constructeurs souhaitant s'y implanter. Mais l'attribution de quotas par pays peut aussi se retourner à l'avantage des concessionnaires français, comme en témoigne Lionel Gleyroux, directeur du marketing chez New Holland France.

«En cœur de gamme, nos commandes sont deux fois plus importantes que ce que nous avions prévu. Heureusement que nous avons récupéré les tracteurs réservés à l'origine pour l'Italie, le seul gros marché européen qui a accusé une baisse des ventes.»

Dans ce contexte de tension sur les composants, les plus mal loties sont les pièces de rechange. Selon Michel Schietequatte, PDG de Same Deutz-Fahr France, la priorité de l'usine est de réserver les composants pour les matériels en parc, au risque de ralentir la production des machines neuves présentes sur la chaîne de montage. Passée quasi inaperçue pour le moment chez les agriculteurs, cette pénurie de composants pénalise déjà les entrepreneurs qui ont désossé leurs machines pendant l'hiver et ne peuvent pas les remonter faute de pièces.

Certains constructeurs tentent néanmoins d'atténuer les effets d'un tel allongement des délais de livraison.

Ainsi, Kverneland a organisé une «bourse des concessionnaires». Les stocks des matériels non commandés des distributeurs sont mis en ligne sur internet. S'il ne dispose pas d'un outil dans son parc, un distributeur peut le trouver chez un confrère et le faire venir dans sa concession.

Pour sa part, Lemken a pu profiter du développement de son outil de production (625 employés en 2006 pour 800 prévus en 2008). Son opération «Miracle bleu» permet également de contenir les délais de livraison. Mise en place avant l'explosion du marché, cette offre lisse la production sur l'année. Le client bénéficie ainsi d'une réduction sur son matériel s'il accepte d'attendre plusieurs mois pour le recevoir. Pour six mois d'attente, cette réduction atteint 8%. Avec une majorité de clients qui commandent sous des délais de cinq à six mois, il est plus facile de répondre à un agriculteur qui se décide à la dernière minute. Néanmoins, celui-ci doit rester minoritaire pour que cette gestion des livraisons reste efficace.

Mais si la constitution de stocks est toujours délicate pour du matériel, quelques constructeurs de petits équipements et des distributeurs ont su anticiper le problème.

Beiser environnement s'est ainsi constitué une avance de stocks de six à huit mois. «Nos clients sont livrés sous un délai de un à quinze jours selon le type de matériel, annonce Bernard Cogniel, directeur de l'entreprise. Nos réserves compensent les délais de livraison croissants de nos fournisseurs.»

Certaines entreprises telles que La Buvette annoncent pouvoir tenir des délais de livraison d'une dizaine de jours. La constitution de stocks est une fois encore la raison de leur réactivité.

Dans le contexte actuel, le prix d'un matériel peut également augmenter entre le jour de la signature du contrat d'achat et le moment de la livraison. Afin de rassurer leurs clients, beaucoup de constructeurs pratiquent le principe des prix garantis. Le tarif défini lors de la signature du bon de commande est celui qui est retenu. Cependant, certains constructeurs de machines, dont les matières premières constituent une part importante des coûts de production, sont tentés de ne pas honorer la commande. A l'agriculteur d'être vigilant au moment de la signature du bon de commande.

O.C., C. L.G., N.L.


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