La sécurité alimentaire mondiale en 2050 pourra être assurée moyennant des adaptations importantes de l'agriculture, selon Michel Griffon, économiste au Cirad (1), qui intervenait mardi au colloque de l'Institut français pour la nutrition (IFN). Une «double révolution verte» permettra de nourrir les 9 milliards d'individus vers 2050. Michel Griffon rappelle l'urgence de concilier une productivité accrue, le respect de l'environnement et l'équité entre les hommes.
Selon lui, il y a trois défis à relever: nourrir les 840 millions de personnes sous-alimentées vivant principalement dans les pays en voie de développement, accueillir 3 milliards de personnes supplémentaires d'ici à 2050 et gérer un milliard de personnes obèses. La situation sera contrastée selon les continents, avec deux «surprises» de la part de la Russie qui devrait devenir un gros exportateur de céréales et l'Amérique latine qui exportera massivement avec un risque environnemental (au péril de la forêt d'Amazonie). L'Asie va importer massivement (autour de 1 milliard de tonnes-équivalent céréales par an), l'Afrique modulera sa demande selon ses ressources et les pays industrialisés exporteront de manière limitée.
Dans ces conditions, difficile pour l'Asie de conserver son indépendance alimentaire. Selon Christian Pèes, président d'Euralis, l'Europe ne doit pas se retrouver dans une position de dépendance. «La Pac doit installer des outils de régulation des marchés pour préserver notre potentiel de production et de transformation», a-t-il insisté, «horripilé» par une Pac qui semble ne plus donner la priorité à la production agricole.
Concernant les moyens pour parvenir à relever les trois défis précédents, Michel Griffon mise sur «l'amélioration de la fertilité des sols en stimulant leur fonctionnement écologique» et la «lutte intégrée», deux voies encore peu explorées par la recherche. «L'Europe doit favoriser l'innovation, a ajouté Christian Pèes, notamment des progrès dans les biotechnologies et les OGM». «Je ne vois pas d'autres solutions si l'on demande à l'agriculteur de réduire sa consommation en énergie et d'utiliser moins de phytosanitaires.»
(1) Cirad: Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement.