Le ministre de l'Agriculture, Bruno Le Maire, a estimé mercredi à l'issue du conseil des ministres que le plan visant à éliminer les algues vertes qui s'échouent sur les côtes bretonnes allait « traiter le mal à la racine ».
Interrogé sur France Info, Bruno Le Maire a précisé que ce plan de 134 millions d'euros sur cinq ans visait à « ramasser les algues dans des conditions de sécurité les plus totales possibles » et « accompagner les agriculteurs pour réduire le taux de nitrates dans l'eau ».
« En dix ans, les agriculteurs ont déjà réussi à réduire de 18 % le taux de nitrates dans l'eau », a précisé le ministre. « Ils sont aujourd'hui à 25 mg de nitrates dans l'eau alors que le seuil fixé par l'UE est à 50 ». « Il faut aller à 10 mg environ », a ajouté le ministre, qui veut prendre de nouvelles mesures telles que « limiter l'épandange, mieux le contrôler, transformer le lisier en méthane grâce à la méthanisation ».
« Tout cela a un coût », a poursuivi le ministre, notamment pour financer des installations de méthanisation.
Sans attendre les détails qui seront présentés vendredi à Rennes par le ministre de l'Agriculture et Chantal Jouanno, la secrétaire d'Etat à l'écologie, les réactions ont fusé en Bretagne.
Agriculteurs et environnementalistes se retrouvent sur un point en déplorant l'absence de concertation : « Ce n'est pas notre plan, c'est le plan du gouvernement », dénoncent les deux parties, qui avaient en revanche été associées aux travaux menés par la mission interministérielle à l'automne 2009 en vue d'établir le rapport qui a servi de base au plan.
La profession agricole a mis en garde le gouvernement contre « un plan d'action algues vertes inefficace et dévastateur pour la Bretagne », a affirmé dans un communiqué Cap Bretagne (Comité pour une agriculture positive), une structure récente émanant des organismes professionnels majoritaires.
Les agriculteurs, inquiets de devoir supporter de nouvelles contraintes dans un contexte économique déjà difficile, ont tenté d'allumer des contre-feux mercredi lors d'une conférence de presse. Ils ont insisté sur la « coresponsabilité » des collectivités vis-à-vis des algues vertes.
Coop de France s'attend à un « plan ambitieux, dont certains aspects méritent encore d’être précisés, notamment en matière de construction et de choix d’indicateurs », a expliqué le syndicat des coopératives dans un communiqué jeudi.
« Dans une perspective de moyen terme », les coopératives insistent sur la « nécessité d’approfondir les expertises sur les causes du développement des ulves et sur les moyens de traitement ». Coop de France précise que « cette demande, soutenue également par l’ensemble de la profession au sein de Cap Bretagne, est de la plus haute importance pour mieux cerner un phénomène multifactoriel... »
Pour sa part, la Confédération paysanne a regretté que le plan ne pose pas « la question du système de production actuel qui entraîne les agriculteurs à la faillite » et génère les algues vertes. « La défense des (emplois) paysans passe par la défense de l'environnement », a assuré Philippe Collin, porte-parole du syndicat.
Pour les associations écologistes, les questions majeures restent sans réponse. « La priorité est-elle donnée à la prévention ou "à la gestion curative des algues vertes" ? », s'interroge Eau et Rivières.
« L'Etat va-t-il enfin prendre ses responsabilités dans le domaine réglementaire ? », poursuit l'association. Elle évoque notamment « les extensions d'élevage hors sol » accordées par les préfectures.
Les ministères de l'Agriculture et de l'Ecologie « n'ont pas encore établi le lien entre environnement et production. Les deux doivent aller de pair. Tant qu'on les dissociera, ça n'ira pas », a assuré Michel Guillemot, président de « Halte aux marées vertes ».
Quant à Sauvegarde du Trégor, elle propose « plutôt que de valoriser la pollution (par la méthanisation), de valoriser l'eau en amont » au travers d'un projet économique qu'elle vient de présenter, a réagi son président, Yves-Marie Le Lay.
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