Syndicats, éleveurs et intermédiaires du secteur de la viande bovine argentine ont fait taire leurs divergences pour réclamer du gouvernement une autre politique face à une situation jugée critique.
«La situation est critique, mais nous avons une forte capacité de réaction. C'est pour cela que nous réclamons des règles claires sur le long terme et que l'état d'urgence soit déclaré dans le secteur de la viande bovine», a déclaré le secrétaire adjoint du syndicat des travailleurs de l'industrie de la viande pour la province de Buenos Aires, Carlos Burelli.
Ce syndicat a convoqué la semaine dernière les acteurs de ce secteur en crise pour parvenir à une plate-forme commune face à un gouvernement dont ils jugent la politique d'intervention sur les prix et les exportations contre-productive.
Selon M. Burelli, 15.000 des 52.000 travailleurs des abattoirs argentins sont touchés par des licenciements ou du chômage technique, en raison de cette politique que la crise économique internationale est venue aggraver.
«Aujourd'hui, le marché est pratiquement paralysé ou en cessation de paiement», a expliqué de son côté Gustavo Hardt, secrétaire de la commission de la viande bovine au sein d'un des principaux syndicats de producteurs agricoles, le Carbap.
Selon lui, la Russie, un des principaux acheteurs de viande bovine argentine, a renégocié ses contrats ou les a abandonnés, provoquant le retour en Argentine de conteneurs remplis de viande.
Le gouvernement limite les exportations afin d'augmenter l'offre domestique et enrayer une hausse éventuelle des prix dans un pays où la consommation de viande est la plus forte du monde avec 75 kg de viande par an et par habitant.
Le gouvernement a ainsi limité en mai dernier à 25% la quantité exportable de viande pour chaque abattoir.
Les exportations de viande bovine argentine ont diminué de 21% entre janvier et septembre 2008 par rapport à la même période de l'an dernier, quand les exportations étaient déjà limitées. Les abattoirs se plaignent aujourd'hui de surproduction, faute de débouché à l'exportation notamment, ce qui entraîne une baisse de la production.
Celle-ci s'accélère également en raison du désintérêt de nombre de producteurs pour une filière qu'ils jugent beaucoup moins rentable en raison du contrôle des prix et des pressions exercées par le gouvernement argentin, soucieux de maintenir les prix les plus bas pour ce produit de très grande consommation.
Certains éleveurs conduisent ainsi plus tôt leurs bêtes à l'abattoir pour s'assurer une rentabilité plus rapide au détriment de la quantité globale mise sur le marché, a expliqué M. Hardt. «En moins d'un an, quelque 2,5 millions de têtes de bétail ont été perdues», a-t-il ainsi averti.