Pour l’heure, 0,1% des 3,65 milliards de repas pris hors domicile dans les administrations, les hôpitaux, les maisons de retraite, les établissements scolaires et universités répondent à ce cahier des charges. Jusqu’ici, seuls les plus militants se sont engagés. Aujourd’hui, proposer une restauration collective bio et de proximité, en particulier en milieu scolaire, fait partie des promesses électorales des municipalités, ainsi que des conseils généraux et régionaux qui versent une compensation financière (1 euro dans le Gard) par repas bio servi aux élèves.
Christophe Bouillaux, membre de l’ANDRM (Association nationale des directeurs de restauration municipale), responsable de la restauration à Lorient (Morbihan), précise les conditions de réussite à l’introduction du bio: avoir une municipalité convaincue de l’intérêt d’une restauration de qualité, le bio n’étant qu’un élément de cette démarche de qualité, disposer de cuisiniers qui savent travailler des produits bruts, initier les enfants pour qu’ils s’habituent à des goûts nouveaux, développer avec des producteurs de proximité des relations de confiance pour un approvisionnement régulier. «Nous avons introduit des yaourts bio en 1999. Aujourd’hui, nous sommes à trois repas par mois. Nous recherchons systématiquement la qualité et elle ne se résume pas au bio: nous préférons le poisson sauvage au poisson d’élevage, fût-il bio. Nous atteignons les fameux 20% des repas bio servis dans les écoles. Ils représentent 25% de nos coûts: un repas bio coûte 30 centimes de plus par assiette. Cela reste mesuré parce que nous devons trouver des produits en quantité, qualité et proximité. Ainsi, nous n’achetons pas d’agneaux bio. Ils viendraient de trop loin.».
Même son de cloche chez Jean-Jacques Hazan, directeur de la restauration scolaire du XIIe arrondissement de Paris et responsable de ce dossier à la Fédération des conseils de parents d’élèves: «Sur les 8 euros que coûte un repas, les produits dans l’assiette représentent souvent 1,50 euro. En travaillant systématiquement des denrées de qualité et en assurant un repas bio par mois, nous sommes passés à 1,65 euro. Le prix moyen payé par les parents est de 3 euros. Le prix des denrées depend aussi de la manière de les cuisiner. Nous avons repensé l’alimentation avec l’aide de diététiciennes. La limite, c’est l’organisation de la filière à cause des quantités que nous traitons.» Avant de passer au tout-bio, il faut déjà repenser la qualité des repas, renoncer à la politique du moins-disant pour emporter le marché, «abandonner les boîtes de conserve», nous dira Jean-Jacques Hazan.
Toutefois, Christophe Bouillaux s’inquiète: « Certaines administrations, qui n’ont jamais eu aucune démarche écologique, lancent aujourd’hui leur appel d’offres sans réfléchir, pour satisfaire à une mode. Le Grenelle nous complique la tâche: il crée un appel d’air et provoque une envolée des cours. J’ai reçu un devis pour des fraises à 8 euros en juin contre 5 euros l’an passé. Je refuse de suivre.»
par Sophie Bergot, Jean-Aalix Jodier, Isabelle Lejas,Marie-Gabrielle Miossec et Juliette Talpin (publié le 30 mai 2008)
Nos offres d'abonnement
simples ou couplées,
à nos publications
hebdomadaires
et mensuelles
Découvrir nos Offres