A l'occasion d'une réunion avec ses collègues européens à Luxembourg, le ministre de l'Agriculture, Michel Barnier, a présenté une «initiative européenne pour la sécurité alimentaire», face à un «contexte grave de crises».
A Haïti, des émeutes de la faim ont provoqué des violences meurtrières, qui ont coûté son poste au premier ministre et obligé le président à décréter une baisse du prix du riz pour apaiser la colère de la population. En Afrique, la hausse spectaculaire des prix de base des matières premières comme le blé, le maïs ou le riz, suscite aussi une grogne croissante.
Dans ce contexte, Michel Barnier propose que l'UE produise «plus et mieux» et reste «une puissance agricole forte», a-t-il dit à la presse à Luxembourg.
Une manière de répondre à ceux qui, comme la Grande-Bretagne, prônent une baisse des subventions agricoles de l'UE, alors que les 27 sont en train d'établir un «bilan de santé» de la Pac.
La France entend lancer dès sa présidence de l'UE, au second semestre de 2008, la discussion sur la place de l'agriculture dans la politique européenne, en vue du débat difficile à venir sur son budget après 2013.
Les Britanniques, s'ils partagent le souci d'aider les pays pauvres à faire face aux crises alimentaires, sont donc méfiants. Ils préfèrent traiter ces questions au niveau international plutôt qu'européen, notamment dans le cadre du G8.
L'exercice initié par la France «ne doit pas consister à résister à la réforme de la Pac ou à faire pression en faveur d'une politique plus protectionniste», a déclaré un diplomate à l'adresse de la France.
Car, pour Michel Barnier, la situation actuelle prouve que l'UE doit rester intransigeante dans les négociations en cours à l'OMC, où elle est sous pression pour réduire ses aides et droits de douane agricoles.
«Nous avons une raison supplémentaire avec cette crise d'être vigilants pour empêcher tout accord déséquilibré», a-t-il argumenté.
Si les déclarations d'intention sur la sécurité alimentaire devraient faire l'unanimité des 27, la France, soupçonnée de défendre aussi dans cette affaire ses intérêts nationaux (elle est la première puissance agricole européenne) risque d'avoir plus de difficultés à emporter l'adhésion sur les autres volets de sa proposition, comme l'OMC.
A Luxembourg, le ministre slovène de l'Agriculture, Iztok Jarc, dont le pays préside l'UE, s'est borné à reconnaître que l'inflation alimentaire était «un problème très sérieux pour le monde et pour l'Europe».
La France milite aussi pour encadrer strictement le développement des biocarburants afin qu'ils ne prennent pas la place des cultures alimentaires.
Elle demande enfin à l'UE de «réorienter les aides au développement et à la coopération vers l'agriculture», domaine délaissé à ses yeux depuis 30 ans, et de faire profiter les plus pauvres de son expertise agricole pour qu'ils retrouvent «une forme de souveraineté alimentaire».
Pour ce qui est des 500 millions de dollars supplémentaires réclamés par le programme alimentaire mondial pour faire face à l'inflation des prix agricoles, Bruxelles a rappelé le lundi 14 avril 2008 avoir déjà débloqué récemment 160 millions d'euros pour l'aide alimentaire et promet simplement «d'examiner» à nouveau la situation.
(Publié en rubrique "Actualités" le lundi 14 avril 2008 | 16h51)
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