Les industriels de l'agroalimentaire ne voient pas de signal clair de reprise en 2015 et souhaitent développer l'exportation alors que les relations avec les enseignes de la grande distribution restent tendues et la guerre des prix « mortifère ».
« Aujourd'hui, les entreprises sont plus en mode survie qu'en développement », a assuré le président de l'Association des industries agroalimentaires (Ania), Jean-Philippe Girard, jeudi lors d'une conférence de presse.
« Près d'une entreprise par jour dépose le bilan »
Les ventes de l'industrie agroalimentaire ont encore connu un recul en 2014 de 0,8 % à 157,6 milliards d'euros. « Près d'une entreprise par jour dépose le bilan », a déploré M. Girard en pointant les 273 défaillances d'entreprises qui ont touché le secteur en 2014, sur un total de 15.789 entreprises. Le secteur avait connu son année la plus noire en 2013 avec une production en repli de 2,2 %, 316 dépôts de bilan et quelque 5.000 suppressions d'emplois.
Le président de l'Ania souligne cependant la « résilience » de ce secteur qui a tout de même créé 545 emplois net (+0,2 %) durant cette année 2014 morose, atteignant 493.272 salariés. Selon une étude du cabinet Utopies, l'agroalimentaire soutient directement et indirectement plus de 2,5 millions d'emplois, en comptant les fournisseurs jusqu'au commerce de détail.
« Repenser le cadre de nos relations commerciales »
Mais pour continuer à tenir son rôle, le premier tissu industriel français « doit être préservé de la guerre des prix menée entre les enseignes de la grande distribution qui freine la capacité du secteur à investir », clame l'Ania.
Le PDG de la filiale française du groupe suisse Nestlé, Richard Girardot, a dénoncé cette semaine avec une rare virulence les méthodes de la grande distribution avec ses fournisseurs et les « pressions » exercées sur les marges et les commerciaux.
Pour renverser la vapeur, estime M. Girard, il est « nécessaire aujourd'hui de repenser le cadre de nos relations commerciales » avec ces clients et de cesser une « guerre des prix mortifère ». « Nos clients disent que le prix des matières premières a baissé, alors que les prix à la production restent à un niveau très élevé », explique M. Girard.
« Eviter les distorsions de concurrence »
Mais si le prix des matières premières a « en effet baissé [...], il reste à un niveau très élevé par rapport à il y a 5 ou 10 ans ».
Pour rebondir, l'Ania espère être mieux accompagnée par l'État. Elle s'oppose ainsi à l'étiquetage nutritionnel qui « stigmatiserait tous les produits français ». Mais elle lui demande également de « simplifier l'environnement réglementaire et économique » des entreprises, en France comme à l'exportation, « pour éviter les distorsions de concurrence ».
L'exportation semble en effet une porte de sortie intéressante pour le secteur, qui a un excédent commercial de 7,8 milliards avec 43,3 milliards d'exportations en 2013, en baisse 0,7 % par rapport à 2013.
Mais le secteur est constitué à 97 % de PME, qui n'ont pas la taille critique pour se lancer seules. Le président de l'Ania préconise un « rapprochement entre les entreprises pour réussir le défi de l'exportation en ayant une taille suffisante. Mais, on a besoin du politique pour avancer et se repositionner », insiste-t-il. « L'enjeu pour les entreprises est hors de l'Europe », ajoute-t-il. Celle-ci représente 68,2 % des exportations, contre 13 % pour l'Asie, et 5,4 % pour l'Afrique.
L'Ania rassemble 20 fédérations nationales sectorielles et 23 associations régionales, représentatives des 11.852 entreprises alimentaires de tous secteurs et de toutes tailles.