Du blé éthanol payé 113 € la tonne quand les cours affichent au minimum le double, la pilule est difficile à avaler pour les quelque 4.000 producteurs du Centre qui se sont lancés dans la filière de l'éthanol aux côtés de leurs coopératives Agralys et Epis-Centre.
En 2006, ces agriculteurs se sont engagés pour cinq ans à fournir du blé éthanol destiné à l’usine Tereos de Lillebonne (avec une contribution au financement de l’usine de 50 euros par tonne).
Le prix de base prévu était de 90 €/t dans le cadre des contrats Agralys; il n’était pas clairement écrit dans les contrats d’Epis-Centre mais présenté comme indexé au prix de l’éthanol (ce qui finalement revient au même prix de base).
Malgré des compléments de prix, les agriculteurs n’ont perçu que 113 €/t aujourd’hui. Beaucoup de producteurs se sentent floués. «J’ai fait confiance à ma coopérative même si le prix n’était pas mentionné sur le contrat; aujourd’hui j’ai un gros manque à gagner», explique cet adhérent d’Epis-Centre qui a engagé 30% de son blé.
Michel Masson, président de la FRSEA du Centre, se fait le porte-parole de la déception des producteurs: «Les agriculteurs attendent un geste de la part de Tereos sinon ils pourraient ne pas livrer leurs contrats l’an prochain», prévient-il. Son organisation réclame d’ailleurs une remise à plat des contrats.
«Il faut que le prix de l’éthanol soit indexé sur ceux du pétrole et du blé, en mettant davantage de transparence entre les maillons de la filière comme pour le diester», indique le syndicaliste.
De leur côté, les groupes coopératifs rappellent le contexte de la mise en place des contrats. «Au démarrage de la filière de l'éthanol, le blé était à 90-100 €/t» , rappelle Jean-François Loiseau, vice-président d’Agralys, «et nos adhérents se sont engagés dans ce nouveau débouché dans des proportions raisonnables de 5 à 10% de leur sole de blé» .
Jean-Marc Dubois, président d’Epis-Centre, demande aux agriculteurs de ne pas juger la filière trop vite: «Nous avons toujours dit que l’éthanol constituait un débouché à envisager à moyen et long termes.» Pour le moment, les deux groupes n’avancent aucun chiffre à propos d’un éventuel complément de prix en fin de campagne.
Réorienter les aides Le groupe Scael (Eure-et-Loir) et quatre coopératives du Loiret se sont engagés à fournir quelques 70.000 tonnes de blé à l’usine Cristanol de Bazancourt, dès sa mise en route en 2009. Pour le moment, la stratégie de Cristanol est de rémunérer le blé éthanol au même prix que l’alimentaire. Mais Philippe Voyet, président du groupe Scael, ne cache pas sa préoccupation face à la flambée récente des cours: «Si les prix se maintiennent à ces niveaux, il faudra reconsidérer le système en réorientant les subventions vers les utilisations énergétiques pour compenser l’écart», indique-t-il. Par ailleurs, comme beaucoup, il espère le démarrage de l’incorporation directe en 2008 qui limitera la pression des pétroliers sur le prix de l’éthanol. |