La part de blé dans le prix d'une baguette en 2012 ne représente que 8 %, et celle du lait dans le prix du yaourt plafonne à 16 %, révèle le dernier rapport de l'Observatoire de la formation des prix et des marges, publié mercredi. Tous produits confondus, la part de la matière première agricole dans « l'euro alimentaire » reste faible : sur 100 € de dépenses, seulement 8 € reviennent à l'agriculture (7,6 € l'an passé).
Prix stables en rayons
Après une année 2012-13 marquée par la flambée des prix des matières premières, les résultats de l'Observatoire étaient très attendus. Ils confirment que les industriels et les distributeurs ont bien rogné leurs marges pour « amortir le choc ». « L'extraordinaire stabilité du prix moyen du lait UHT en GMS s'explique par un ajustement au niveau des marges des industriels, a illustré Philippe Chalmin, président de l'Observatoire. Pour la tranche de jambon, l'ajustement s'est plutôt fait du côté des distributeurs ».
Le grand gagnant est donc le consommateur. Pour Philippe Chalmin, « la vive concurrence entre les enseignes de distribution semble bien être le fluide du circuit de refroidissement des hausses de prix agroalimentaires et de leur transmission vers le consommateur ». Problème : ce système d'ajustement arrive en bout de course. « Tout le monde est dos au mur, il n'y a plus rien à grappiller », confirme l'économiste. Surtout en élevage. « Même en tenant compte des hausses de prix, les secteurs d'élevage étaient au début de 2013 clairement dans le rouge dans le domaine du porc, de la volaille et à peine à l'équilibre – en tenant compte des subventions – pour la viande bovine et le lait. Quant aux industriels, ils n'ont cessé de se dégrader. »
Marges faibles, voire négatives
L'Observatoire confirme par ailleurs la faiblesse des marges nettes que s'octroient les distributeurs : 2,3 % en moyenne sur l'ensemble des rayons étudiés (1,5 % après répartition de l'impôt sur les sociétés, l'« IS »). Leurs comptes laissent même apparaître des marges négatives pour certains rayons : -1,3 % en boucherie (-0,8 % après répartition de l'IS), -2 % en boulangerie-pâtisserie ( -1,3 après répartition de l'IS) et -5,8 % dans le secteur de la marée, qui regroupe les produits de la pêche et de la pisciculture (-3,7 % après répartition de l'IS).
Selon la FCD (Fédération des entreprises du commerce et de la distribution), qui s'est rapidement exprimée sur le sujet, « la rentabilité négative de la boucherie, de la boulangerie et de la marée s'explique par des coûts de personnel plus élevés que les autres, en raison notamment des besoins d'entretien du rayon et de service des clients. A titre d'exemple, les frais de personnel spécifiques au rayon de la boulangerie représentent 30,5 % de son chiffre d'affaires ».
Fait nouveau, l'Observatoire des prix et des marges est parvenu à décortiquer l'ensemble des charges pesant sur les rayons. Les charges directes (approvisionnement, eau, gaz et électricité, taxes et redevances spécifiques..) comme les « charges communes réparties » (immobilier, frais de personnels hors rayon, frais financiers et autres charges communes variables selon les enseignes). Un grand pas pour la transparence.
Bien sûr, comme l'année passée, les critiques ne devraient pas manquer. D'abord parce que les moyennes réalisées pour les besoins de l'Observatoire cachent les disparités entre les magasins. Tous n'adoptent pas les mêmes stratégies de rayons et ne répartissent pas leurs charges de la même manière. Ensuite, parce que les résultats reposent uniquement sur les données qu'ont bien voulu communiquer les enseignes. Mais Philippe Chalmin refuse de remettre en cause « la qualité scientifique » de ces travaux. « On peut toujours les améliorer, estime-t-il, mais ils sont inattaquables. Et il n'est d'ailleurs pas sûr que la DGCCRF ait de meilleurs chiffres sur les comptes de rayon ! »
Téléchargez le dernier rapport de l'Observatoire de la formation des prix et des marges.