Une cinquantaine d’agriculteurs malades du fait des pesticides ont créé samedi l'association Phyto Victimes. Elle a pour but d’accompagner ses adhérents moralement, de les conseiller administrativement et juridiquement, pour être plus forts ensemble.
« Si mon mari était encore là, il aurait été candidat au conseil d’administration. Alors j’y vais pour lui. » Lisette Ballet a perdu son mari, Christian, mort l’an dernier d’un cancer. Il était agriculteur. Sa maladie était due aux produits phytosanitaires qu’il utilisait sur son exploitation.
Samedi 19 mars, Lisette Ballet était à Ruffec, en Charente, pour la création de l’association Phyto Victimes.
La liste des maladies dont souffrent ses adhérents est effrayante : cancers du sang, de la vessie, de la prostate, maladie de Parkinson, syndrome myéloprolifératif… Le point commun, c’est qu’elles ont toutes été provoquées par les traitements agricoles.
Dans la salle sont réunis des exploitants malades, des épouses et des parents pour lesquels le soutien passe par cette bataille contre le fatalisme, des veuves aussi dont les maris ont déjà été emportés. Les histoires sont graves, souvent tragiques, mais les membres de cette nouvelle association, malgré les difficultés qu’ils vivent au quotidien, font preuve d’une incroyable dignité, de courage et de détermination.
L’association a pour but d’accompagner ses adhérents moralement, administrativement et juridiquement.
Cela commence par la procédure à mettre en œuvre auprès de la MSA pour faire reconnaître la maladie professionnelle, voire des tribunaux quand la MSA s’y refuse. Elle travaille en lien avec un cabinet d’avocats qui s’est déjà illustré notamment dans la défense des victimes de l’amiante, avec des médecins conseil de la MSA, avec des toxicologues…
« Il faut que nous, les agriculteurs, nous cessions de culpabiliser », plaide avec calme Paul François, céréalier et désormais président de Phyto Victimes. « Nous avons utilisé des produits autorisés, qui avaient des AMM (autorisations de mise sur le marché). Il ne faut plus laisser les firmes parler à notre place et laisser croire que celui qui est malade n’a pas pris toutes les protections nécessaires. »
Aujourd’hui, ils ne sont que quelques-uns à avoir pu obtenir la reconnaissance de la maladie professionnelle. D’autres à leur tour entament des démarches dans le même but.
Le phénomène n’en est sans doute qu’à ses débuts. Pour le faire émerger, il faudra aussi que les exploitants dépassent leur premier sentiment de culpabilité. Signe inquiétant, sur le seul département de la Charente, ils seraient une trentaine d’agriculteurs souffrant d’un cancer de la vessie ou de la prostate…
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