La Grande-Bretagne s'interroge sur la qualité de sa viande, après la révélation que deux bovins, progéniture d'une vache clonée, ont fini dans les assiettes des consommateurs depuis 2009, et que les autorités cherchent à retracer une centaine de leurs descendants.
L'agence britannique de sécurité alimentaire (FSA) a indiqué jeudi 5 août enquêter sur 97 bovins de race laitière holstein, « des clones de troisième génération », après avoir confirmé cette semaine que la viande de deux animaux, issus d'embryons d'une vache clonée, avait été vendue.
Une décennie après l'épizootie d'ESB (encéphalopathie spongiforme bovine), ces informations relancent les interrogations sur la viande au Royaume-Uni. Mais les autorités assurent que la consommation d'animaux ou de leurs produits issus du clonage ne présente pas de danger pour la santé.
Selon la législation européenne, la vente de viande et de produits générés à partir de clones et de leur progéniture, considérés comme des aliments nouveaux, nécessite une autorisation spécifique de mise sur le marché, contrairement aux Etats-Unis où la pratique est autorisée depuis 2008. La FSA a précisé n'avoir jamais donné de permission ni en avoir reçu la demande.
L'agence a indiqué avoir retracé les bovins nés en Grande-Bretagne de huit embryons d'une vache clonée aux Etats-Unis.
La viande de deux bovins, abattus respectivement en 2009 et 2010, a été vendue et consommée selon la FSA, et celle d'un troisième animal abattu en juillet 2010, à été écartée des circuits de distribution. Un quatrième animal fait toujours partie d'un élevage laitier, mais l'agence n'a pas confirmé si son lait avait été commercialisé.
Ces informations ont émergé quand la FSA a ouvert une enquête après la publication par le quotidien International Herald Tribune fin juillet d'un article affirmant que des éleveurs européens, notamment britanniques et suisses, avaient commencé à avoir recours à des animaux clonés. Le journal cite notamment un éleveur britannique non identifié – afin de préserver son activité et son revenu - qui affirmait vendre le lait d'un animal issu d'un clone avec le lait du reste de son élevage.
Selon le Daily Telegraph, un fermier américain a fait réaliser un clone de la vache Holstein « Vandyk-K Integrity Paradise », qui a été inséminée ensuite avec la semence d'un taureau. Des embryons congelés de cette union ont été vendus à trois fermes britanniques.
La famille Innes, qui possède une ferme près d'Inverness dans le nord de l'Ecosse, a confirmé mercredi 4 août avoir acheté en 2008 deux taureaux issus du clone américain. « Nous avions interrogé les autorités compétentes à l'époque pour s'assurer que cela était légal et nous avions reçu l'assurance qu'il n'y avait pas de problème », a assuré Steven Innes s'inquiètant du sort des 96 vaches de son élevage, des « clones de troisième génération », encore trop jeunes pour donner du lait.
Le directeur général de la FSA, Tim Smith, a estimé que ce genre de situation était inévitable. « Il nous est impossible de rester auprès de chaque animal et de le regarder suivre toutes les phases de son cycle de vie », a-t-il déclaré à la BBC.
Le député européen conservateur Struan Stevenson (Ecosse) a accusé le flou de la réglementation européenne « actuellement confuse et inadéquate », manquant de « mesures de sauvegarde ». Selon lui, c'est elle qui a permis ce genre de situation.
« C'est pourquoi les députés européens ont récemment appelé la Commission européenne à établir une résolution urgente sur les importations clonées tout en interdisant dans l'intervalle les importations dans l'UE de l'ensemble de la viande et des produits laitiers issus de clones sauf s'ils bénéficient d'un certificat», a-t-il déclaré.
Un tiers des britaniques prêts à consommer des produits issus du clonage Le clonage des animaux a généré de nombreux débats depuis la naissance en 1996 en Ecosse de la brebis Dolly, premier mammifère cloné. 45 % des Britanniques affirment ne pas vouloir consommer de produits alimentaires issus d'animaux clonés, contre 34 % qui n'y voient pas d'inconvénient, selon un sondage Yougov publié cette semaine. Les détracteurs du clonage, comme l'association britannique « Compassion dans l'élevage mondial », accusent cette technique de poser des risques élevés pour la santé des animaux. Les professionnels y voient au contraire la possibilité de donner à plus d'éleveurs l'accès à des animaux exceptionnels, à la viande moins grasse, ou qui produisent plus de lait. L'organisme représentant l'industrie laitière britannique, Dairy UK, relayant la position de l'Efsa, l'autorité européenne de sécurité des aliments, a affirmé de son côté que « le lait et la viande d'un descendant de clone ne présentaient pas de risque alimentaire », pas plus du moins que les produits issus d'animaux élevés de manière conventionnelle. |