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Crise de l'élevage

« Un producteur a besoin de perspectives de croissance pour moderniser ses bâtiments » (Philippe Mangin)

Publié le jeudi 10 septembre 2015 - 10h28

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Selon Philippe Mangin, président de Coop de France, que nous avons interviewé, la réglementation française a étouffé la compétitivité des élevages français. Quant au redressement des marchés, il passe par des mesures à prendre d'urgence à Bruxelles.

 

L'impératif industriel des coopératives peut-il l'emporter sur l'intérêt économique des agriculteurs ?

 

Une coopérative, quand elle a une vocation industrielle, écoule sa production à la fois sur le marché intérieur français, à l'exportation vers l'Europe et vers les pays tiers, avec des valorisations différentes. Elle ne peut pas promettre un prix que le marché n'est pas capable de lui rémunérer. Quand on lui demande de respecter un accord franco-français, cela ne peut se faire que sur une partie de la production.

 

Certains coopérateurs se demandaient, lors des manifestations, si les coopératives les défendaient encore. Jusqu'à envisager de recréer d'autres outils. Que leur répondez-vous ?

 

Mais comment voulez-vous qu'une coopérative oublie l'intérêt de ses producteurs sociétaires ? Le jour où les producteurs n'ont plus confiance, la coopérative est morte. Dans une période de profond désarroi, qu'il y ait du questionnement, c'est normal. Nous avons demandé dès juillet aux coopératives d'ouvrir leurs comptes à leurs adhérents, d'être transparentes pour que le doute ne s'amplifie pas. Ce que j'ai entendu, au soir du 3 septembre et sur le terrain, c'est le ras-le-bol des mesures annoncées qui repoussent les problèmes. Les agriculteurs veulent avant tout des baisses de charges. Ils me disent qu'ils préféreraient des ristournes sur le prix de l'aliment. C'est là le bon message, là où les coopératives doivent porter l'effort. Je suis lorrain. On a subi une sécheresse épouvantable. C'est très chaud dans les campagnes. Les agriculteurs n'admettent pas que, dans un marché céréalier pas très porteur, le prix de l'aliment ne baisse pas. Je l'entends partout. Je ne peux pas entendre dire que les coopératives sont sourdes aux problèmes des éleveurs. Tout le monde est dans la même galère. Il ne fait pas bon être dirigeant aujourd'hui dans toute la filière. On peut perdre gros en une semaine. Les risques sont énormes.


Vous parlez compétitivité et restructuration des élevages. Que mettez-vous derrière ces mots ?

 

La crise se résume à une crise des charges à Paris et une crise des prix à Bruxelles. Les exploitations françaises sont asphyxiées sous les charges en tout genre. Au pire moment de la crise, il y a eu entre 25 et 35 centimes d'écart entre le MPB de Plérin avec les pays du nord de l'Europe. Depuis des années, la réglementation contraignante décourage la modernisation et l'agrandissement des élevages. Sans fixer un objectif de taille, chaque producteur doit avoir des perspectives de croissance pour avoir envie de moderniser ses bâtiments. L'agrandissement d'un atelier donne une meilleure maitrise des problèmes environnementaux, des perspectives de méthanisation. Il faut une taille minimum ou pouvoir regrouper les ateliers d'un même village. Produire un peu plus, ce n'est pas forcément manger le voisin. Sauf dans l'état actuel de la réglementation qui est à changer.

 

LA SOLUTION EST A BRUXELLES

 

Et sur la crise des prix, pourquoi êtes-vous déçu par Bruxelles ?

 

Ce qui se passe sur les marchés ne peut se résoudre que par l'intervention de Bruxelles. Il est impossible que les seules enseignes de la grande distribution, les seuls coopératives ou industriels puissent faire remonter le prix des produits agricoles. Il n'y a que Bruxelles qui peut prendre des mesures de rééquilibrage des marchés avec le relèvement des prix d'intervention, le stockage. L'embargo russe résulte de la décision des chefs d'Etat. On ne la conteste pas, mais pourquoi ne pas indemniser les agriculteurs qui en font les frais ? On est revenu les poches vides lundi soir. Il y a encore une rencontre mardi à Luxembourg.

 
La qualité est-elle trop élevée face à la demande du marché ?

 

La France s'est mobilisée sur les produits de qualité. Or, on ne mange pas des produits de haute qualité tous les jours. Dans la vraie vie à la campagne ou à l'heure du déjeuner, l'immense majorité des ménages fait attention à ses dépenses alimentaires. La France perd des places dans la gamme médium. On ne doit pas négliger la consommation quotidienne. Cela représente des volumes extrêmement importants à ne pas abandonner aux autres Européens.


Le manger français a-t-il alors une signification ?

 

Le consommateur est sensible à l'origine de son produit. Si l'étiquetage était obligatoire, on y gagnerait. Cela redonnerait un peu de chance à nos filières. Est-ce possible d'inverser la tendance vers des prix toujours plus bas alors que les GMS font toute leur communication sur le prix ? Nous avons entamé un débat avec toutes les enseignes. Nous essayons de construire un accord cadre. Le modèle de la grande distribution évolue. Le prix toujours plus bas ne suffit plus à attirer le consommateur. Mais il n'est pas prêt à accepter des augmentations des dépenses dans n'importe quelle condition. Nous sommes sur un marché unique.

 

Propos recueillis par Marie-Garielle Miossec et Bérengère Lafeuille


Les commentaires de nos abonnés (1)
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Président à Vie

jeudi 10 septembre 2015 - 21h55

Depuis 30 ans , je vous vois président et votre discours n'a pas changé (Malheureusement), malgré 1 contexte complétement différent. Il faut être compétitif, mais si les grosses " coops " ne jouent plus leur role. Compétitif, cela signifie, toujours investir, toujours agrandir et toujours éliminer l'emploi rural. Aujourd'hui votre modèle dominant subit une crise profonde en élevage. Je vois que : - ceux qui vous suivent ( les + nombreux) sont trés dépendants du banquier, du marchand d'aliments vivent des périodes difficiles jusqu'à jeter l'éponge. - ceux qui sont plus autonomes en terme décisionnel et même fourrager se trouvent - étrangler par le système et s'en sortent bien sur des petites fermes.
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