« On est chez nous, on reviendra ! FNSEA, fais gaffe à toi, c'est la fin de ton diktat ! », ont scandé sans relâche le jeudi 14 octobre 2010 les militants de la Confédération paysanne avant d'être expulsés de la Maison du lait qu'ils occupaient depuis le 8 septembre 2010.
L'« expulsion volontaire obligatoire », comme l'a baptisée Jacques Muller, sénateur-maire du Haut-Rhin (Verts), s'est déroulée sans heurts et dans le calme, entre 15 heures et 16h30, sous le regard des forces de l'ordre (une vingtaine d'hommes en tenue) et de l'huissier de justice. Les militants ont laissé des locaux propres. La serpillière a été passée jusqu'au dernier jour. Ils n'ont laissé aucun graffiti au mur. Toutes les affiches étaient décollables.
A 15 heures, des représentants en civil des forces de police et de gendarmerie sont entrés au siège du Cniel (l'interprofession laitière) pour négocier la sortie des quelques 40 militants encore dans les locaux et soutenus par une dizaine de députés, sénateurs et conseillers généraux de gauche, qui ont d'ailleurs apporté leur soutien à la Confédération paysanne tout au long de ces cinq semaines.
A 15h10, les pompiers sont entrés pour s'assurer du bon état de santé des trois syndicalistes qui en étaient à leur dix-huitième jour de grève de la faim. Sortis de la Maison du lait sur des civières, leur combat a été salué par une haie d'honneur de militants et d'élus de gauche. Ils ont été emmenés en observation à l'hôpital. Leur grève n'est pas terminée pour autant. « La proposition de dialogue n'est pas suffisante. Notre entrée dans l'interprofession doit être inscrite au calendrier des négociations », a indiqué André Bouchut, gréviste de la faim.
A 16 heures, tous les autres militants ont quitté la Maison du lait, après une déclaration du porte-parole de la Confédération paysanne. Tout en fustigeant « la répression et le mépris » du ministère, Philippe Collin a indiqué que l'expulsion ne résout pas le problème.
Pourtant, la Confédération paysanne est plutôt satisfaite des avancées obtenues. « Désormais, rien ne sera comme avant dans le paysage agricole français », « Les problèmes paysans sont aujourd'hui mieux compris », « L'archaïsme de sa représentation est porté au regard de tous », « Un règne s'achève, celui du monolithisme syndical et de sa mainmise financière sur les fameuses contributions volontaires obligatoires, argent de tous les paysans », sont autant de motifs de satisfaction.
Pour Philippe Collin, « l'entrée de la Confédération paysanne dans les interprofessions est inéluctable. Elle ne pose plus de question ».
Les forces de l'ordre pourraient rester en faction plusieurs jours devant la Maison du lait, afin que la Confédération paysanne ne revienne pas trop vite. La journée de vendredi ou de lundi risque d'être décisive. Bruno Le Maire recevra toutes les organisations syndicales représentatives pour s'assurer qu'elles sont d'accord avec sa proposition.
Proposition qui consiste à inciter les syndicats à se rencontrer à la Maison du lait, pour discuter des questions laitières (prix du lait, organisation des contrats, avenir de la Pac), suivant un calendrier qui doit se clore en mars 2011. Le ministère ne sera pas partie prenante dans ces réunions.
« L'objectif de la rencontre avec le ministre est de créer un climat de confiance et de dialogue afin que les uns et les autres puissent travailler ensemble par la suite », explique une source proche du ministre. « Et en mars prochain, sur la base de ces discussions, j'ose espérer que le dialogue qui se sera conduit dans le cadre de la Maison du lait aura permis de débloquer les choses et de montrer que le dialogue est préférable à la confrontation actuelle », a indiqué Bruno Le Maire mercredi à l'Assemblée nationale.
Mais la Confédération paysanne ne compte pas attendre six mois pour reparler de son entrée dans l'interprofession. Elle souhaite que le calendrier que se fixeront tous les syndicats mentionne la date, ou au moins les conditions, de son entrée au conseil d'administration.
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