Ségolène Royal a annoncé, vendredi 19 décembre, la tenue d'une ultime réunion de l'ensemble des acteurs concernés par le dossier controversé du barrage de Sivens (Tarn) « avant le 10 janvier » à Albi, alors que, selon les ONG, les discussions piétinent.
La ministre de l'Ecologie, qui a reçu successivement jeudi et vendredi les agriculteurs, les élus et les ONG environnementales, a précisé à l'AFP que les experts chargés de faire émerger une solution de compromis remettraient leur rapport définitif « vers le 20 janvier ».
La réunion de janvier « sera la dernière. C'est la réunion de restitution qui devait avoir lieu jeudi. Vu les tensions sur le terrain, j'ai préféré recevoir séparément » les différents acteurs, a-t-elle expliqué. « Je voulais que les choses s'apaisent un peu. »
La décision finale revient au département
Cette annonce intervient alors que le président du conseil général du Tarn appelle à « trancher » au début de janvier, en invoquant « un problème de maintien de l'ordre » sur le site.
Les experts nommés après le décès de Rémi Fraisse, le jeune écologiste mortellement blessé le 26 octobre par une grenade offensive au cours d'affrontements avec les forces de l'ordre à Sivens, « vont voir les gens individuellement et éventuellement collectivement » au début de janvier, a-t-elle expliqué. « Ils vont pouvoir répondre à toutes les questions avant de faire leur rapport définitif » et « il appartiendra au maître d'ouvrage, c'est-à-dire au département, de faire son choix ».
L'évacuation du site « pas possible » selon les ONG
Selon les ONG, qui espéraient une poursuite des pourparlers en janvier, les discussions piétinent.
« La position de la ministre est relativement bloquée » ; elle souhaite d'abord « l'évacuation » du site occupé par les opposants au barrage, a déclaré à l'AFP le président de France Nature Environnement (FNE), Denez L'Hostis, à l'issue de la rencontre avec Mme Royal. « Et ça, ce n'est pas possible pour nous. »
Pour le porte-parole du Collectif pour la sauvegarde de la zone humide du Testet, Ben Lefetey, « le processus de discussion, de dialogue a été rompu par la FNSEA qui refuse tout autre scénario qu'un barrage à Sivens, que le barrage initial ». « Tant qu'ils refusent de discuter des autres scénarios, il sera difficile pour le ministère de poursuivre le processus », a-t-il ajouté.
« Chacun campe un peu sur ses positions », a reconnu Mme Royal. Elle estime cependant « qu'il y a quand même un effort pour essayer de comprendre les points de vue ». « Il n'y a pas encore de consensus mais il n'y a pas de refus d'examiner les différents scénarios. »
5 scénarios alternatifs
Une cinquantaine d'agriculteurs de la FDSEA et des JA du Tarn se sont rassemblés vendredi à la fin de la matinée devant la préfecture à Albi pour soutenir le projet de barrage. « Seul le projet initial de Sivens est pertinent », ont indiqué leurs responsables, en écho à la position des chambres d'agriculture du Tarn et du Tarn-et-Garonne.
Les irrigants de France ont, eux, dénoncé le « manque de transparence » vis-à-vis des « pistes d'action envisagées ». Ils rappellent, dans un communiqué, que « les instances locales restent les seules compétentes et légitimes pour identifier la meilleure solution technique ».
Le Collectif pour la sauvegarde de la zone humide du Testet « souhaite qu'on reprenne le travail au début de janvier pour approfondir les scénarios qui sont dans le rapport d'étape » du 17 décembre, a déclaré M. Lefetey.
Selon plusieurs participants aux discussions, cinq scénarios sont proposés par les experts.
D'après la fédération régionale FNE Midi-Pyrénées, l'un d'entre eux envisage « le pompage de l'eau du Tarn » et les quatre autres « prévoiraient une retenue soit principale, soit latérale à Sivens ». Ces quatre scénarios « ne sont pas discutables », a estimé la fédération. « Par contre, le scénario 5 – sans cette retenue de Sivens – nous paraît intéressant parce qu'il part des retenues collinaires existantes ».
Pour le secrétaire de la Confédération paysanne du Tarn-et-Garonne, Josian Palach, « c'est un projet qui demande à être affiné sérieusement ».
Contesté depuis plusieurs années par des associations locales, le projet de barrage de Sivens vise à créer une retenue d'eau d'une capacité de 1,5 million de mètres cubes pour l'irrigation de terres agricoles.
Ce dossier, qui a déjà fait l'objet de nombreux recours en justice pour son coût et ses conséquences sur l'écosystème, a pris un tournant dramatique à la fin d'octobre avec la mort de Rémi Fraisse.