Après le Roussillon au début du mois, et quelques appellations de Provence, les premiers coups de sécateurs ont été donnés par endroits jeudi dans le Bordelais, et certaines communes champenoises vont suivre dès vendredi, avec, finalement, une dizaine de jours d'avance seulement.
Le printemps extraordinairement chaud avait laissé présager des vendanges exceptionnellement précoces, mais le temps maussade de juillet a ralenti la maturité de la vigne.
En Champagne, les vendanges débuteront vendredi dans quatre communes de l’Aube et trois de la vallée de la Marne. « Dès le 25 août, près de 90 % du vignoble aura débuté la récolte, ce qui est inédit dans l’histoire du vignoble champenois, plus habitué à vendanger en septembre », explique Pascal Férat, le coprésident du Comité interprofessionnel des vins de Champagne (CIVC).
En Provence, dont 88 % des AOC sont des vins rosés, « plusieurs domaines ont déjà commencé mais le gros de la troupe devrait commencer à vendanger lundi » 22 août, a expliqué François Millo, directeur du conseil des vins de Provence. C'est « quatre jours plus tôt qu'en 2010 », et le contexte météorologique a été favorable à une bonne récolte, a-t-on appris jeudi auprès de l'Interprofession des vins de Provence.
Dans le Beaujolais, le ban des vendanges vient d’être fixé au 24 août. Les premiers coups de sécateurs seront donnés dans le sud du vignoble, un des secteurs les plus avancés. il s’agit de la deuxième année la plus précoce après 2003, où les vendanges avaient commencé le 8 août.
En Alsace, la récolte devrait débuter à la fin d'août pour le crémant et aux alentours du 12 septembre pour le riesling. « Ce sera un millésime à peu près normal », car « avec cet été maussade on a mangé toute l'avance qu'on avait en mai », a-t-on souligné à l'Association des viticulteurs d'Alsace.
Dans le Jura, les prévisions tablent entre le 25 et le 29 août, soit deux semaines d'avance.
Seul le Roussillon (Pyrénées-Orientales) avait vendangé très tôt, dès le 4 août, mais ce sont les particularités du vignoble qui l'ont imposé.
Jeudi, c'est le Bordelais qui avec 10 jours d'avance, a donné les premiers coups de sécateurs sur les blancs des cépages sauvignon, dans les crus de Graves (Château Carbonnieux, Latour Martillac ou Château Smith Haut Lafitte), terroir où les cailloux emmagasinent la chaleur. Ordinairement, les vendanges y sont réalisées plutôt du 25 août au début de septembre. Dans le Médoc, la récolte des blancs débutera lundi et pour ses fameux rouges comme Margaux, Saint-Julien ou Pauillac, la date prévue est comprise entre le 6 et le 9 septembre.
« Au printemps, le végétal a poussé très vite et les prévisions donnaient trois semaines d'avance. Mais vers le 14 juillet il y a eu quelques pluies, il a fait plus frais, et on a récupéré 10 jours », explique Henri Boyer, œnologue conseil dans le Bordelais.
« On a perdu en précocité mais on ne s'en porte pas plus mal », souligne-t-il, car « la pluie devenait alors indispensable » à la vigne qui n'alimentait plus son fruit, et « trop de précocité entraîne un décalage entre la maturité des arômes et celui du tanin », très important pour la garde des vins rouges.
Dans les régions viticoles françaises, le cru de 2011, qualifié tout de même de précoce, sera ainsi comparé aux deux récoltes hâtives de 1997 et 2003.
« Une telle précocité, trois années à si peu d'intervalle, traduit un phénomène de réchauffement », estime Eric Perrin, gérant du Château Carbonnieux. Il a noté aussi un allègement du nombre de grappes sur les pieds, ce qui aboutit à un raisin de meilleure qualité, arrivant plus tôt à maturité. « On est sûrs d'avoir du fruit, c'est très aromatique », confirme Henry Boyer, l'œnologue bordelais, car « cela fait un mois que nous avons des nuits froides et c'est très bon pour les arômes. »
Cependant, si les années précoces sont, selon lui, « statistiquement très bonnes », les viticulteurs gardent un œil inquiet sur la météo d'ici aux vendanges.
« Il faut une fin de mois d'août ensoleillée et peu de pluie. Un nouveau stress hydrique serait idéal pour maintenir les arômes et donner du temps au tanin pour qu'il mûrisse », explique-t-il.
A météo exceptionnelle, le cru de 2011 sera-t-il qualifié lui aussi d'exceptionnel alors que 2009 et 2010, vendangés tardivement, resteront dans les annales ? « Même s'il faut encore attendre, cela laisse présager des choses intéressantes », estime M. Boyer, qui préfère pour l'heure qualifier 2011 d'« inédit » en raison de la précocité des fruits combinée aux nuits d'été froides.
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