L'Afja (Association française des journalistes agricoles) organisait ce mercredi 10 octobre 2012 un débat autour du livre « La viande voit rouge ». Ce livre a été coécrit par Pascal Mainsant, de l'Inra, et René Laporte, spécialiste du commerce et de l'industrie du bétail et de la viande, lassés de voir sans cesse ceux qu'ils appellent les antiviande, monter avec succès au créneau médiatique.
Selon Pascal Mainsant, le front antiviande réunit à la fois des organisations du courant végétarien, des associations qui font de la viande le bouc émissaire de la faim dans le monde et des ONG sensibles au réchauffement climatique. La radicalisation de ces mouvements, dont certains sont très anciens, remonte à la crise de la vache folle. Elle se justifie aussi par le besoin de faire le buzz dans les médias pour exister.
Selon lui, sur les cinq libertés qui doivent être respectées pour l'élevage des animaux (accès à l'eau, confort de l'habitat, prévention des maladies, maîtrise des peurs et du stress, respect du comportement naturel) seuls les points 2 et 5 ne sont pas aujourd'hui entièrement respectés.
Philippe Dumas, éleveur et président de la Cicarev, a souligné de son côté les efforts sans cesse croissants des éleveurs. « Certes, nous travaillons pour l'argent parce que c'est notre gagne-pain. Mais n'oublions pas que si nous acceptons les contraintes de l'élevage, c'est aussi parce que c'est une passion. Ce n'est ni notre envie ni notre intérêt de faire souffrir les animaux », a-t-il expliqué.
Face aux tenants de l'élevage est intervenu un représentant de d'OABA (Œuvre d'assistance aux bêtes d'abattoirs), Frédéric Freund. Il est à l'origine de la diffusion au printemps d'un reportage stigmatisant certains abattoirs dans l'émission « Envoyé spécial » de France 2. Celle-ci déclencha la polémique autour de la viande halal puis cascher.
Il a précisé ne pas vouloir dénoncer tous les abattoirs mais certaines pratiques inacceptables. Il demande une concertation sur les abatages rituels en particulier, et de manière générale, l'application des contrôles prévus par les réglementations en vigueur.
Une fois de plus, les éleveurs et les professionnels de la filière ont souligné combien leurs pratiques ont évolué, combien chaque question comme celle de l'abattage rituel ne peut recevoir une réponse simpliste sous peine de mettre à mal toute la filière. « En mouton, nous valorisons une part des abats de la filière label grâce à la filière halal. Doit-on transformer les abats en déchets », s'est interrogé Philippe Dumas. ll s'est également étonné avec humour que des associations ne s'inquiètent pas davantage du sort de Parisiens entassés dans le métro.
Selon Philippe Collin, porte-parole de la Confédération paysanne, il faudra débattre de la place des animaux dans les exploitations comme dans la société, une place qui a été boulversée depuis 50 ans, celle du cheval notamment. « Il faut repenser nos rapports aux animaux sans tomber dans les raisons binaires : bien ou mal », a-t-il expliqué.
Quant à la représentante de la Fondation Nicolas Hulot, elle a affirmé qu'il n'y aurait pas d'agriculture sans élevage. Mais elle demande elle aussi de raisonner la place des animaux à l'aune de la diversité biologique et du réchauffement climatique.