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Bergère à tout prix

vendredi 25 mai 2012 - 11h21

Venue des Flandres, où elle dirigeait une entreprise de courrier express, Jacqueline veille sur 1.300 brebis.

L'hiver à Saint-Rémy-de-Provence, l'été à Colmars-les-Alpes. Jacqueline Vasques partage son existence entre plaine et estives. Elle est bergère transhumante.

Dans moins d'un mois, elle prendra son baluchon pour rejoindre la « cabane », son logis estival, à plus de 1.000 mètres d'altitude. Sa cinquième saison dans ce massif montagneux, à une demi-heure de route non goudronnée du village.

Quatre mois durant, Jacqueline veille sur le troupeau de René Tramier, l'éleveur qui l'emploie.

En 2011, elle a signé le CDI tant attendu. Rarissime dans la profession...

Arrivée en Provence en 1994, cette Belge travaillait dans le secteur du courrier express. Elle a suivi son compagnon dans le Sud, au soleil. Là, Jacqueline enchaîne les petits boulots et donne naissance à son quatrième enfant. Mais toujours pas de poste fixe à l'horizon.

« J'ai toujours été attirée par les brebis », dit-elle, avec son accent flamand. Sur internet, elle découvre l'école du Merle, qui forme au métier de berger à Salon-de-Provence. Le défi la motive. Elle s'inscrit en 2007. La scolarité dure un an.

 

Attaque de loups

Jacqueline effectue ses stages d'agnelage et de garde chez René. L'été suivant, il lui propose de « faire la montagne » comme saisonnière. « Avec mon fils Laurent, nous cherchions un berger, se souvient René. Jacqueline s'était montrée sérieuse. »

Elle accepte, mais ne part pas seule. Elle emmène ses deux plus jeunes enfants, âgés de six et douze ans à l'époque. « J'ai prévenu l'école. Les professeurs m'ont donné les leçons. »

Dès la première semaine, c'est la mise à l'épreuve. Les loups attaquent le troupeau. A l'aube, elle découvre les brebis dévorées. « Je me suis effondrée, j'ai pleuré. » D'autres auraient fui. La bergère tient bon. Elle soigne les animaux blessées avec sa trousse de berger.

« Jacqueline est plus attentive aux pathologies que les hommes, estime René. Lorsque je monte assurer le ravitaillement, aucune de mes brebis ne boite et les interventions ont été notées. »

Le soir, la bergère choisit de laisser les brebis là où elles ont pâturé la journée. Elle rejoint sa cabane à une heure et demie de marche. « Plus on les déplace, moins les brebis profitent de l'herbe », confie-t-elle. Jacqueline rassemble son troupeau en douceur et évite de lâcher systématiquement les chiens. Quelques coups de sifflet suffisent le plus souvent.

A quarante-sept ans, elle a trouvé sa voie et réussit à concilier transhumance et vie de famille.

 

 

Alpage en location

René Tramier et son fils adhèrent à un groupement de quatre éleveurs. Ils louent les alpages de Colmars-les-Alpes, où transhument leurs brebis, à l'Office national des forêts et à des propriétaires privés. Leur troupeau pâture sur 700 à 800 ha de bois et forêts.

Jacqueline raisonne la progression des brebis à l'intérieur des différents quartiers de ce périmètre, pour qu'elles puissent se nourrir pendant quatre mois. Elle ne les laisse pas plus de deux jours au même endroit. Deux ânes l'aident à monter les filets des enclos, du sel et des croquettes pour les chiens.

 

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Chantal Sarrazin

(publié le 25 mai 2012)

 

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